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particulière pour une entreprise de 40 millions et de lui concéder une subvention payable en soixante annuités. Il s’agissait d’un entrepôt réel à créer à Bercy pour emmagasiner les liquides destinés à l’approvisionnement de la capitale. La loi d’annexion de 1859 avait en effet accordé une double concession : aux usiniers de l’ancienne banlieue, elle donnait le droit d’entrée sans taxes pour les matières premières destinées à la fabrication, la houille notamment, et aux marchands de vins des communes annexées la faculté d’entrepôt à domicile. Ces deux privilèges étaient concédés pour dix ans. Comment finirait le premier ? Par l’établissement de taxes uniformes dans l’ancienne et la nouvelle ville, soit qu’on exigeât des usiniers de la banlieue les mêmes droits d’entrée que ceux précédemment perçus dans Paris, soit qu’on réduisît la quotité des droits pour tous. Cette question méritait assurément d’être mûrie et discutée à l’avance ; mais elle était de celles qui peuvent compromettre la popularité de l’administration, ou déranger l’équilibre financier : on en retarda donc la solution le plus possible, et c’est seulement aux derniers jours de 1869 qu’un premier projet a été présenté au conseil d’état. Repoussé d’abord comme trop peu libéral, il a été suivi d’un second qui réduit les droits sur les charbons et facilite l’entrée des matières premières. La question, encore en suspens comme on le voit, présente une certaine gravité en ce qu’elle ouvre la discussion sur le système général de l’octroi, base à Paris de tout l’édifice financier.

Quant à la faculté d’entrepôt à domicile pour les vins, concédée pour dix ans, la solution est tout imposée d’avance ; la ville s’est obligée à bâtir un entrepôt réel ou à faire profiter toute la capitale de la faculté d’entrepôt à domicile ; mais comment exécuter cette dernière mesure, lorsque Paris renferme 4,000 marchands de vins en gros et 22,000 détaillans, alors surtout que tout propriétaire a le droit d’introduire chez lui une certaine quantité de liquide, pourvu qu’il se soumette à l’exercice, c’est-à-dire à la vérification des quantités par les agens du fisc ? L’entrepôt à domicile ne pouvant être accordé sans l’exercice, qui est vraiment impraticable, il n’y avait qu’à établir un entrepôt réel, lieu de dépôt pour les liquides avant la vente et le paiement des droits d’entrée. Malheureusement on s’est avisé bien tard de satisfaire aux prescriptions de la loi. C’est au commencement de 1869 seulement que le préfet de la Seine a signé avec la société des magasins-généraux un traité pour construire à Bercy, moyennant une subvention payable en soixante annuités, un entrepôt véritable, dont la dépense était évaluée à 40 millions. Le traité, soumis d’abord au conseil d’état, devait être présenté au corps législatif. Il imposait au concessionnaire l’avance de toutes les sommes à débourser, sauf à en récupérer l’intérêt et l’amortissement par la