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princesse impériale qu’à s’affermir comme reine de Hollande. Cette mésintelligence politique, venant se joindre aux incompatibilités de caractère que nous avons signalées, rendit de nouveau la vie commune insupportable aux deux époux. La correspondance suivie d’Hortense avec Joséphine et probablement aussi avec Napoléon devait porter les traces de ces mécontentemens. Ce qui est sûr, c’est que Louis devint bientôt soupçonneux, défiant envers sa femme ; il se crut plus d’une fois épié et dénoncé par elle. S’exagéra-t-il la portée des plaintes qu’une jeune reine qui s’ennuyait put faire entendre à sa mère et à son beau-père ? Le fait est que, peu de mois après son arrivée en Hollande, ayant trouvé une bonne occasion de rentrer en France, à Paris, elle ne voulut pas alors revenir dans le pays dont elle était la reine, et que le roi ne fit aucun effort pour la rappeler près de lui.

Mais nous anticipons sur la marche des événemens ; parlons, avant de poursuivre l’histoire du règne, de la constitution que Louis avait apportée toute faite, et qui fut acceptée, comme sa royauté, par leurs hautes puissances, ainsi que du traité entre la France et la Hollande qui devait régler les rapports ultérieurs des deux états.

Schimmelpenninck, dans son exil volontaire, dut se reprocher d’avoir si facilement consenti à introduire dans la république batave un système de gouvernement aussi peu libéral que celui de la constitution de 1805. La constitution royale n’en fut qu’un décalque, et même, à quelques égards, elle fut moins restrictive des droits de la nation. Par exemple, au lieu de ne compter que dix-neuf membres, chiffre vraiment ridicule pour une assemblée législative, leurs hautes puissances se composèrent désormais de trente-huit représentans. Du reste leur mode de nomination, le caractère illusoire de leur vote en matière de budget et d’impôt, l’absence du droit d’initiative, le manque absolu de garanties en faveur de la presse et du droit de réunion, rien de tout cela ne fut changé. Les prévisions de l’empereur ne l’avaient pas trompé, quand il avait rédigé la constitution de 1805 de compte à demi avec Schimmelpenninck. Les républicains ne pouvaient pas se plaindre d’avoir moins de liberté sous le roi Louis que sous le conseiller-pensionnaire. La constitution royale garantissait la dette publique, le maintien de la langue nationale dans la rédaction des lois et l’administration, une protection égale à tous les cultes, jointe à l’obligation pour chacun d’eux de se renfermer pour l’exercice dans l’intérieur des temples. Elle donnait au roi un conseil d’état de treize membres où les ministres avaient séance et voix délibérative. Elle se servait, pour définir les attributions royales, d’une phrase inquiétante par le vague des expressions. « Le roi, disait-elle, a exclusivement et sans