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domicile de secours, c’est-à-dire a déterminé à qui incombait le soin de subvenir aux besoins des indigens et des malades ; sans cela, les départemens dégorgeraient tous leurs pauvres sur Paris, qui serait promptement converti en maladrerie centrale de toute la France. Il faut un séjour de cinq ans pour avoir droit à l’assistance de la commune que l’on habite ; mais c’est là une prescription générale qui n’a rien d’absolu, une règle que mille circonstances particulières font éluder. On peut affirmer, sans craindre de rester en dehors de la vérité, qu’à Paris l’on tient compte avant tout des conditions où l’individu qui sollicite se trouve placé. S’il est sérieusement en péril, si la misère qui l’atteint est réelle, si au point de vue de la plus simple humanité il a droit à un secours, il l’obtient immédiatement. J’ai vu accorder une allocation à un jeune ménage bavarois qui n’était à Paris que depuis six semaines. Souvent, lorsque des étrangers qui ignorent une langue, qui sont venus parmi nous attirés par on ne sait quelle vague espérance, veulent retourner dans leur pays, on leur procure un passe-port gratuit et des frais de route à l’aide desquels ils peuvent voyager sans avoir à souffrir de la faim.

En tant qu’œuvre de charité, l’assistance publique se trouve donc en présence de deux genres d’indigences parfaitement distinctes : l’une, qu’on pourrait appeler permanente, a pour personnel les individus qui reçoivent des secours spéciaux ; en 1869, ils étaient au nombre de 6,982, qui se décomposent ainsi : 455 paralytiques, 917 aveugles, 1,345 octogénaires et 4,265 septuagénaires ; l’autre, essentiellement éventuelle et transitoire, est représentée par tous les accidens de la vie, d’autant plus fréquens à Paris que la ville est plus populeuse. Il faut savoir se défendre contre cette indigence-là, car très souvent elle est feinte, du moins intentionnellement exagérée, et, comme nul scrupule ne la retient, elle mettrait volontiers la main sur le bien les pauvres. Entre la nécessité de ménager ce dépôt précieux et les entraînemens si faciles de la compassion, il y a une mesure à garder ; l’assistance publique la connaît, et il me semble qu’elle l’observe d’une façon qui mérite d’être approuvée. Les progrès qu’elle a su accomplir depuis 1849 sont considérables. Dans cette œuvre ingrate par excellence, car elle ne satisfait jamais complètement les convoitises qui l’assaillent, elle a toujours procédé avec une extrême prudence et la meilleure volonté de bien faire. Elle a donné à certains services, entre autres à celui du traitement des malades à domicile, une extension considérable, qui, sans nul doute, se développer encore. Les résultats obtenus sont déjà dignes d’être remarqués ; les registres de traitement ont en 1869 reçu 72,706 inscriptions, doit 11,671 pour accouchemens et 61,035 pour faits de maladie. Le total des journées de maladie a été de 842,907,