Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1870 - tome 89.djvu/158

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Zollverein. Il est inutile de dire que la France est la reine de l’industrie de la laine ; elle fait marcher pour cette fabrication 3,300,000 broches, nos voisins du Zollverein n’en ont pas 1,500,000 à nous opposer. Les chiffres manquent pour l’industrie des soieries ; mais, quoique la Prusse y tienne un rang considérable, nous la surpassons en quantité et en qualité. Nous avons moins d’avantages pour les industries extractives et métallurgiques. D’après des données récentes, le Zollverein produit chaque année près de 300 millions de quintaux métriques de charbon minéral (houille, anthracite, lignite), notre exploitation se borne à 126 millions de quintaux ; mais nous sommes arrivés à une production annuelle d’environ 13 millions de quintaux de fonte contre 10 millions que nous oppose le Zollverein. La production du fer a été évaluée pour la France à plus de 8 millions de quintaux et à 7 millions 1/2 pour nos ennemis. On le voit, nous sommes pressés vivement par l’Allemagne dans toutes ces branches d’industrie. Nous devons être sur le qui-vive et avoir l’œil ouvert pour ne pas être dépassés. Nous avons en effet pour rivale sur le continent une nation dont les classes inférieures sont remarquablement laborieuses, patientes, persévérantes, et dont la classe supérieure possède au plus haut degré l’esprit de progrès. L’on a pu dresser, il y a quelques années, un tableau du nombre et de la puissance des machines à vapeur fixes et locomobiles dans les principaux pays d’Europe. La France comptait alors 242,209 chevaux-vapeur, le Zollverein 222,985 ; mais il y a une branche d’industrie qui ne peut s’évaluer en chiffres et où nous devançons de beaucoup l’Allemagne, ce sont les industries de luxe, qui chaque année prennent un plus grand développement. Ceci est notre domaine incontesté ; nous y régnons par droit de conquête et par droit de naissance, en vertu de ces qualités exquises et de ces merveilleuses aptitudes dont la Providence a gratifié notre génie national, en vertu aussi de traditions fécondes qui fortifient et épurent notre goût naturel.

Ainsi s’explique notre supériorité générale sur les peuples qui composent le Zollverein ; sur bien des points, ils nous suivent de près, sur plusieurs même ils nous dépassent ; mais, au point de vue de l’ensemble, nous les surpassons d’une manière considérable par la quantité et la qualité de nos produits, par la variété et l’intensité de nos moyens. Au milieu même des anxiétés présentes, c’est encore une consolation permise que de porter ses regards par avance sur le tableau de la lutte pacifique et féconde qui s’établira entre la France et l’Allemagne après la guerre. Quand cette lutte sanglante sera glorieusement terminée, nous aurons à reprendre nos travaux de la veille. Alors nous aurons à profiter des enseignemens que