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l’application de ces taxes ; mais les marchands qui se croient lésés arriveront à comprendre qu’il est juste de faire participer tout le monde au sacrifice commun. L’institution d’un grand nombre de fourneaux économiques de cantines municipales où les indigens trouveront là des prix, insignifians une suffisante nourriture, est aussi une fondation qui fait honneur aux magistrats de la ville. On ne saurait trop louer non plus la surveillance sévère exercée par l’administration sur tous les commerçans, afin de découvrir ceux qui, profitant des malheurs publics, ne craignent pas de vendre à des prix odieusement exagérés les objets de première nécessité. On les a menacés, ceux-là, de publier et d’afficher leurs noms. Espérons, qu’ils tiendront compte de l’avertissement et subordonneront leur cupidité aux exigences du salut public, qui sont celles du plus vulgaire patriotisme.

Abordons maintenant la question à un autre point de vue, recherchons s’il n’est pas possible de remédier, dans certaines mesures, aux effets d’une alimentation insuffisante et de soutenir d’une façon commode les forces de l’organisme. Un tel résultat n’est pas à dédaigner dans un moment où il convient de ménager autant que possible les ressources alimentaires dont on dispose. En 1850, Gasparin communiquait à l’Académie des Sciences, des observations très intéressantes concernant les effets du café. Il faisait voir que les mineurs de Charleroi conservent la santé et une grande vigueur musculaire en absorbant une nourriture moitié moindre que celle qu’indiquent la théorie et la pratique journalière. Seulement ces ouvriers belges ajoutaient à cette nourriture deux litres d’une infusion préparée avec 30 grammes de café. Grâce à cette addition, ils pouvaient travailler bien plus que les ouvriers français, nourris plus abondamment. Le docteur Jousand publia en 1860 des expériences d’un caractère plus décisif. A l’aide de 120 grammes de café en poudre et de 3 litres d’infusion obtenue avec 200 grammes de cafés de provenance diverse, soit en moyenne 46 grammes par jour, il put lui-même supporter sans inconvéniens, sans rien changer à ses occupations, un jeûne absolu de sept jours entiers et consécutifs.

La physiologie rend compte aujourd’hui de ces faits, que nous aurions pu citer en grand nombre. Le. café empêche l’organisme de se dénourrir, il ralentit la combustion des matières nutritives à l’intérieur de nos organes, il diminue la déperdition constante qu’éprouve la substance de nos tissus : c’ est comme la cendre jetée sur le feu. Quelques médecins ont proposé même de l’appeler un agent d’épargne. Tels étaient du moins les faits constatés, quand les expériences récentes, du docteur Rabuteau sont venues en fournir des preuves plus explicatives et péremptoires. Ce physiologiste a montré en effet que ce ralentissement de la combustion vitale se traduit par des phénomènes très nets. L’acide, carbonique de l’air expiré diminue, l’urée, diminue également, le pouls