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Page:Revue des Deux Mondes - 1870 - tome 89.djvu/702

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d’oiseaux gigantesques existant dans les bois et les montagnes. Après les dernières explorations de la grande île africaine, cela paraît une improbabilité. Un naturaliste jeune et intelligent, M. Grandidier, avait fait, il y a peu d’années, un voyage à Madagascar ; ayant beaucoup appris, il a voulu retourner sur cette terre qui lui promettait de nouvelles découvertes. Tout récemment dans une fouille pratiquée au milieu d’un terrain marécageux d’Amboulisate, sur la côte occidentale de l’île ; M. Grandidier a eu la bonne fortune de recueillir des ossemens qui ont appartenu, paraît-il, à l’oiseau dont les œufs sont incomparables. Ces pièces se réduisent, il est vrai, à deux vertèbres, un os de la cuisse, un os de la jambe ; elles ont suffi à M. Alphonse Milne Edwards pour démontrer la parenté de l’æpyornis avec les autruches, les casoars et les dinornis, et pour établir la preuve que l’oiseau de Madagascar, avec un corps plus massif et des membres plus robustes que chez tous les dinornis, n’avait pas cependant la taille aussi élevée que les plus grandes espèces de la Nouvelle-Zélande. Des débris d’aepyornis de proportions inférieures trouvés en petit nombre nous révèlent en outre l’existence, à une époque sans doute peu ancienne, de plusieurs espèces appartenant au même type et habitant les mêmes lieux.

Tout le monde en France et dans les autres parties de l’Europe s’aperçoit de la diminution rapide des oiseaux. Les plus grandes espèces seront peut-être entièrement détruites avant un siècle. L’outarde, qu’on trouvait assez communément dans les plaines du Poitou et dans la Champagne au temps de Buffon, est aujourd’hui d’une excessive rareté. Le tétras, plus connu sous le nom de grand coq de bruyère, autrefois abondant au milieu de nos forêts, ne se trouve plus que dans quelques localités. De si beau gibier offre une trop forte tentation aux chasseurs.

Dans les siècles passés, les grands pingouins (Alca impennis), habiles à nager, incapables de voler, fourmillaient sur les rivages des régions arctiques ; ils ont été détruits, anéantis. A une époque assez reculée, ils étaient communs sur toutes les côtes de la Scandinavie, comme aux îles Orcades, aux îles Féroe, sur le banc de Terre-Neuve ; dans un temps plus rapproché du nôtre, on les voyait encore communément en Laponie et au Groenland ; dans les premières années du siècle actuel, ils n’existaient plus que sur les îles boréales peu fréquentées. Depuis trente ou quarante ans, on n’en a plus rencontré un seul nulle part. Le grand pingouin empaillé figure dans quelques galeries d’histoire naturelle ; c’est maintenant un objet d’une valeur inestimable. Oiseau de la grosseur d’une oie, ayant les parties supérieures du corps d’un noir de velours, la gorge nuancée de brun et les parties inférieures blanches, le pingouin présente des caractères zoologiques d’un intérêt particulier ;