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ment, soit après l’inoculation, ne la contractent plus. Des essais eurent lieu vers la même époque en France et en Angleterre. Le résultat le plus certain fut la prolongation de l’épizootie. On attribue aux inoculations les pertes énormes qu’éprouva la Hollande. L’expérience fut répétée en France en 1815. Girard pratiqua l’inoculation à l’École vétérinaire d’Alfort. Il en avait même conclu que la maladie est moins grave quand elle est inoculée. « Cette pratique, disait-il en parlant de l’inoculation, a l’avantage d’atténuer la maladie et de la rendre curable. Elle suffit pour préserver les animaux d’une seconde infection. » Les faits antérieurement observés sont contraires à cette seconde opinion. Le marquis de Courtivron nous apprend que, lors de l’épizootie de 1745, des maquignons vendaient des animaux portant encore l’empreinte de la peste bovine, mais guéris, 200 et même 300 livres, « c’est-à-dire, vu les lieux, plus de six fois leur valeur. » Les cultivateurs de la Bresse, du Bugey, du Maçonnais, les achetaient, dit-il, à cause de la croyance que les animaux qui avaient échappé à la maladie se trouvaient ensuite hors de son atteinte. Il n’en était rien. Les animaux mouraient entre les mains des acquéreurs, à une seconde ou à une troisième atteinte du mal. Personne ne songerait aujourd’hui à pratiquer l’inoculation dans nos pays. Elle n’aurait d’autre conséquence que de nous imposer des pertes plus grandes peut-être que celles qu’eut à supporter la Hollande par suite des inoculations faites par son célèbre médecin. Il paraît cependant démontré qu’elle rend des services là où la maladie est enzootique, dans quelques parties de la Russie, Près du lieu de son origine, la peste bovine attaque naturellement presque tous les animaux ; on cherche à la produire quand le moment, la saison paraît favorable. D’après M. Jessen, sur 1,417 bêtes inoculées à Karlowka de 1857 à 1865, il n’y en a eu que 77 dont la maladie soit devenue mortelle, tandis que sur 1,247 cas de maladies venues spontanément de 1853 à 1857, il y en a eu 625 de mortels. L’immunité produite par une première atteinte dm mal serait, d’après les observations faites dans l’Europe orientale, de trois et même de cinq ans.

Une instruction publiée par le gouvernement à l’occasion de la terrible épizootie qui en 1774-75 dépeupla le sud-ouest et causa des pertes que l’on a évaluées à plus de 15 millions de livres pose sagement la question de l’abatage, moyen rigoureux, mais seule capable de débarrasser une contrée de la peste bovine. Il est constant, dit-on dans cette instruction, qu’aucun remède connu n’a pu triompher du fléau, que, s’il est possible de sauver quelques individus, ce ne pourrait être que par un traitement commencé dès les premiers instans du mal et suivi méthodiquement avec une attention