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rection suprême de l’instruction publique, il imprima un véritable élan à cette branche de son administration.

Ce n’étaient encore, ainsi que l’amnistie accordée aux Polonais, que des mesures préparatoires. Alexandre ne devait se poser carrément en réformateur qu’après son couronnement. Cette solennité eut lieu le 7 septembre 1856. Il voulait en faire le point de départ d’une nouvelle existence pour son pays, le premier jour d’une ère nouvelle. Ses premiers actes sont l’expression de sa nature généreuse, et ne pouvaient rencontrer que des approbations : il se conciliait l’affection de ses sujets. Son manifeste, où respire cette piété mystique si conforme au génie des Russes, n’est d’un bout à l’autre qu’une série de bienfaits. Après avoir accordé des récompenses à ceux qui avaient pris part à la guerre, il allège les deux plus lourds fardeaux du peuple, le recrutement et l’impôt. Aucun recrutement ne devait se faire pendant quatre ans, et quant à l’impôt, il devait être réduit en proportion de la diminution de la population et réparti d’une manière plus conforme à la justice. Il fait remise aux débiteurs du fisc de tous les arriérés échus avant le 1er janvier 1856, de toutes les amendes encourues pour infraction aux règlement ou lacunes dans l’accomplissement de leurs devoirs ; il arrête toutes les poursuites judiciaires dans des cas dont il donne la nomenclature, ou pour simples contraventions de police. La classe des condamnés politiques, classe rendue si nombreuse par l’inflexible Nicolas, qui se croyait revêtu d’une autorité divine et mesurait l’offense à la grandeur de l’offensé, ne fut pas oubliée. Les années 1825,1826 et 1827 et l’insurrection de la Pologne en 1831 avaient peuplé la Sibérie et les mines de l’Oural. Alexandre commua la peine des uns et accorda la grâce des autres, mais sous des conditions qui diminuaient la valeur du bienfait. Les individus placés sous la surveillance de la police furent libérés, et il adoucit le sort des criminels. En un mot, ce manifeste ne laisse en dehors de la mansuétude impériale aucune classe d’accusés, d’inculpés ou de condamnés. Il est d’une ampleur, d’une richesse extraordinaire. L’empereur semble avoir fouillé tous les coins et recoins de son empire pour découvrir et soulager les victimes du règne de son père.

Alexandre s’occupa d’établir promptement des communications non-seulement entre les différens points de son empire, mais avec les pays avoisinans. Il supprima les droits pour obtenir l’autorisation de voyager, et les remplaça par une légère taxe, consacrée aux invalides. Aussi favorable aux chemins de fer que son père leur était hostile, il facilita la construction immédiate des principales grandes lignes en garantissant un intérêt de 5 pour 100 aux actionnaires des compagnies qui se formèrent sous son impulsion. La seule voie