Page:Revue des Deux Mondes - 1872 - tome 99.djvu/539

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
533
LES ÉCOLES D’APPRENTIS.

où son instruction serait incomplète, il serait toujours loisible à l’enfant de suivre, après l’expiration de son apprentissage, les classes et les cours d’adultes. Dans ce changement de rôle, les patrons, dont ce n’était pas le métier, se montraient plus soucieux de l’instruction des enfans que les maîtres, dont ce devait être le premier souci. Ce que les patrons demandaient comme un surcroît désirable et possible, les maîtres le repoussaient comme un excès.

Par toutes ces causes, les bourses d’apprentissage ont marché d’échecs en échecs, qu’aggravait le délaissement de l’opinion. C’est dommage, le principe était bon. Plus simples dans leurs conditions, moins gênans dans la forme et moins sobres de vues morales, les contrats d’apprentissage, passés sous le patronage de la ville, auraient conservé plus longtemps la faveur publique. Il eût fallu élever le taux de la bourse au lieu de l’abaisser, encourager l’externat, qui maintient et développe l’esprit de famille, s’attacher de préférence aux métiers qui s’apprennent lentement et exigent le concours d’un art, former ainsi une clientèle qui eût créé et perpétué une tradition, fourni un corps de maîtres et préparé une légion d’élèves. Aujourd’hui il n’est plus temps, la vogue est ailleurs. Il est des pentes qu’on ne remonte point, celle-ci est du nombre, des occasions qu’on ne néglige pas impunément. Pour les écoles de garçons, la bourse d’apprentissage ne sera bientôt plus qu’un souvenir, tout au plus survit-elle dans les écoles de filles, où les moindres récompenses pécuniaires ont tant de prix. Quelque jour, cet argent, resté dans les cadres des budgets municipaux, sera converti en livrets de caisses d’épargne de 50 et 25 francs à distribuer aux élèves les plus méritans parmi ceux qui auraient obtenu la distinction en faveur aujourd’hui, le certificat d’études.

Comme dernier essai et dernier titre de la ville de Paris dans cet ordre d’encouragemens et d’enseignement, il ne reste plus à citer que les classes et les cours d’apprentis, les classes pour les connaissances les plus élémentaires, les cours pour les notions plus développées. Le succès des cours du soir en 1864 a marqué dans l’histoire de l’éducation populaire, et les classes d’apprentis, surtout celles de la rue Morand et de la rue d’Aligre, y ont fourni un contingent considérable. Si les cours du soir cette année n’ont pas retrouvé leur effectif régulier, ils présentent ce caractère, que les apprentis y sont dans une proportion sensiblement plus considérable, — deux tiers environ, — que les adultes proprement dits. Néanmoins le grand succès de la ville, celui dont elle peut le plus s’enorgueillir, c’est, dans les classes des apprentis, l’enseignement du dessin. Six classes de dessin pour les apprentis existaient avant 1850, tant dans les écoles laïques que dans les écoles congréganistes. On en compte aujourd’hui 33 : 28 pour le dessin d’art,