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profond qu’inventif du fondateur de l’école florentine. Enfin, sans compter divers sujets sacrés ou mythologiques, le chef-d’œuvre du Titien, ce Martyre de saint Pierre dominicain, qu’un incendie détruisait en 1866 à Venise, revit dans la copie qu’en avait très habilement exécutée autrefois M. Appert. Pourquoi, en regard de ces vastes pages, de ces témoignages, concluans, nous avoir montré seulement de Léonard ce qui, dans l’histoire de sa vie et de ses travaux, n’a que la valeur et les proportions d’un épisode ?

Il n’y aura que justice à mentionner encore, parmi les œuvres d’origine italienne, les belles copies de M. Mottez et de M. Blanchard d’après Tintoret et Carpaccio, — de M. Sturler, de M. Bézard et de M. Quantin d’après fra Bartolommeo, le Dominiquin et le Pérugin, — de M. Giacomotti d’après la fresque du Sodoma, l’Évanouissement de sainte Catherine, à Sienne, et d’après le tableau de Corrége à Londres dans la Galerie Nationale, Vénus, Mercure et l’Amour, — parmi les copies de tableaux hollandais, les reproductions, par M. Bonnat, de la Leçon d’anatomie de Rembrandt, et par feu Lanoue, du Taureau de Paul Potter.

Quant à l’école française, on n’en pourra juger ici que par quatre toiles d’après Poussin, — le Martyre de saint Érasme, une Bacchanale très froidement copiée par Stella, la Mort de Germanicus et le Paysage conservé dans la galerie Sciarra, à Rome. Or, sauf ce beau paysage, de telles œuvres, lors même qu’elles seraient, comme la Mort de Germanicus, rendues avec une complète exactitude, résument-elles suffisamment les caractères de notre art national et les mâles qualités du génie de Poussin ? Révéleront-elles à ceux qui l’ignorent, rappelleront-elles à ceux qui ont pu déjà l’apprécier, le genre de mérite propre à ce noble maître, à ses doctrines, à sa manière, expression souveraine de la raison dans l’art ? Franchement, mieux aurait valu exclure tout à fait l’école française du palais des Champs-Elysées que de la condamner à y figurer sous des apparences aussi peu significatives et, quant au nombre, dans d’aussi chétives proportions. Certes le savant historien de l’art à qui ses fonctions administratives imposent la responsabilité principale dans la formation du nouveau musée a, moins que personne, besoin d’être renseigné sur les droits et les titres des maîtres appartenant à notre pays. Pour pressentir à cet égard sa justice, il suffira de se fier à sa mémoire : aussi nous contenterons-nous d’en appeler à l’auteur de l’Histoire des peintres des omissions, momentanées sans doute, que des esprits un peu trop pressés pourraient quant à présent reprocher au directeur des Beaux-Arts.

Le musée des copies, tel qu’on le voit aujourd’hui, — c’est-à-dire, suivant les termes mêmes de l’avis officiel, à l’état de « commencement, » — répond-il à l’attente de ceux qui, sur la foi de certaines promesses imprudentes, croyaient y trouver un majestueux ensemble des