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la route directe de Versailles. C’était tout cela que nos éclaireurs rencontraient. Dès lors il n’y avait plus de temps à perdre, si l’on voulait essayer de rompre ces colonnes en marche. Le général Ducrot prenait aussitôt ses dispositions dans la soirée du 18, faisant occuper en avant le parc de Plessis-Piquet par le 15e de marche du colonel Bonnet, et il attendait lui-même la fin de la nuit pour s’élancer ; tout était réglé. Tandis que le général de Maud’huy restait à Villejuif, faisant face à l’ennemi qu’il avait devant lui à Thiais, et que le général de Maussion se plaçait à Bagneux, le vrai mouvement offensif était indiqué par le plateau de Châtillon. La division d’Hugues, formant la gauche, devait s’avancer sur Petit-Bicêtre, puis, si on n’était pas arrêté, sur Verrières. La division de droite, partant de Clamart sous le général de Caussade, avait la mission de gagner Vélisy, Villacoublay sur la route de Versailles, en passant par la ferme de Dame-Rose, par la ferme de Trivaux ; elle devait être appuyée par le régiment provisoire de zouaves qui était à Meudon, et qui avait l’ordre de la rejoindre en marche. Entre les deux ailes, au centre, la cavalerie devait se former en six colonnes de deux escadrons, couvrant le plateau, reliant les deux divisions. Chaque colonne était suivie de deux batteries d’artillerie qui, au premier signal, devaient passer dans les intervalles des escadrons, se déployer, et, s’il se pouvait, gagner les crêtes du ravin de la Bièvre, d’où l’on pourrait foudroyer les Prussiens. Le plan était fort simple, restait malheureusement l’imprévu.

A cinq heures du matin, le 19, on s’ébranlait, et jusqu’à sept heures les choses ne semblaient pas défavorables. On était déjà aux prises avec l’ennemi ; l’artillerie avait pu se déployer, se porter en avant et ouvrir un feu des plus sérieux sans être arrêtée par les Prussiens. La division d’Hugues, ayant en tête le 7e bataillon de mobiles de la Seine, atteignait les premières maisons de Petit-Bicêtre, lorsque tout à coup retentissaient sur la droite des cris aigus se mêlant au bruit de la fusillade. Une affreuse panique venait de s’emparer des zouaves, qui entraient à peine en ligne vers Trivaux et qui se débandaient follement avant d’avoir combattu, malgré tous les efforts de leurs chefs. Le général Ducrot, s’apercevant aussitôt de ce qui arrivait, se précipitait avec ses officiers pour essayer de rallier tout ce monde éperdu. Un instant les zouaves semblaient se laisser ramener : aux premiers obus qui blessaient quelques hommes, ils prenaient de nouveau et cette fois définitivement la fuite à travers les bois de Clamart, pour ne s’arrêter qu’à Paris, où ils allaient dès le matin propager une panique dont ils étaient les seuls auteurs ; 300 d’entre eux seulement se repliaient vers Meudon et y restaient jusqu’au soir. Il faut dire que