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LE
ROMAN DE LA RÉVOLUTION

Quatre-vingt-treize, par M. Victor Hugo, 3 vol. in-8o, Paris 1874; Michel Lévy.

Un nouvel ouvrage de M. Victor Hugo, un nouveau recueil de l’auteur des Feuilles d’automne, un nouveau drame de l’auteur d’Hernani, combien cette simple annonce, il y a quarante ans, éveillait de curiosités ardentes et de poétiques sympathies! Il n’était pas nécessaire de le faire traduire dans toutes les langues, de le faire paraître dans toutes les capitales à la fois. On n’avait pas besoin de notifier au genre humain que l’œuvre du maître serait publiée le même jour en français à Paris, en anglais à Londres, en allemand à Vienne, en hongrois à Pesth, en russe à Saint-Pétersbourg, en suédois à Stockholm, en espagnol à Madrid, en italien à Rome. L’art de la mise en scène, encore dans l’enfance, ne connaissait pas ces effets gigantesques, les annonces d’Eugène Renduel suffisaient; le nom de M. Victor Hugo était le seul talisman. On dévorait les pages du livre, on était avide de savoir quelle surprise le poète avait réservée à ses lecteurs, on voulait juger dans quel sens se développerait cette imagination puissante, quels chants ou quelles clameurs sortiraient de cette âme sonore, toute pleine d’étrangetés et de mystères. L’inquiétude n’était pas moins vive que l’espérance, inquiétude touchante et glorieuse, signe de ces amitiés qui se forment entre un poète et une génération. Si jamais M. Victor Hugo a conquis une popularité profonde, durable et digne de lui, ça été dans ces jours de libre essor où la sève courant sous l’écorce éclatait en bourgeons et promettait tant de richesses. Que tout cela est