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général Faure, faisait aussitôt abattre le drapeau. On envoyait un officier au général de Wimpfen, qui repoussait avec emportement la pensée de capituler ; son âme de soldat se révoltait, et c’était bien naturel. Peu après, vers quatre heures et demie, le général Lebrun, envoyé par l’empereur, arrivait à Balan auprès de Wimpfen, qui l’accueillait avec sa proposition de tenter la percée. « Soit, répliquait froidement Lebrun, nous sacrifierons 2 ou 3,000 hommes de plus sans résultat utile ; mais, si vous le voulez, marchons ! » Et les deux chefs, ramassant un millier d’hommes, marchaient en effet à la rencontre de l’ennemi ; seulement, au bout de 200 mètres, ils s’apercevaient qu’ils n’étaient plus suivis.

Tout s’effondrait, il n’y avait plus rien à espérer. Wimpfen, rentrant à Sedan, essayait encore de se dérober à la fatalité qui l’étreignait en envoyant sa démission à l’empereur ; mais quoi ? aucun des généraux n’aurait voulu accepter la responsabilité du dénoûment qui se préparait. C’était cruel sans doute d’être arrivé la veille d’Afrique, d’avoir pris le commandement à neuf heures du matin pour signer une capitulation le soir. Puisque le général de Wimpfen avait si vivement revendiqué les périlleux devoirs du commandement, puisqu’il restait seul le chef de l’armée, seul il pouvait traiter en son nom, et il finissait par se résigner. Pendant que ces dernières scènes se passaient, l’empereur avait reçu un officier parlementaire envoyé par le roi de Prusse, qui, chose curieuse, ignorait la présence de Napoléon III à Sedan, et avec cet officier était parti le général Reille, chargé de cette lettre tristement fameuse : « n’ayant pu mourir à la tête de mes troupes, je remets mon épée à votre majesté ! » Tout était là : reddition personnelle de l’empereur à discrétion, nécessité de traiter pour l’armée.

Un jour de vivres dans la place, les Prussiens déjà maîtres des portes de Sedan, tout autour 500 bouches à feu encore chaudes de la lutte et pointées sur le dernier refuge d’une armée en détresse, 240,000 hommes disposés de façon à fermer tous les passages, toutes les fissures, — c’est dans ces conditions que le général de Wimpfen, accompagné du général Faure, du général Castelnau, aide-de-camp de l’empereur, et de quelques officiers, se rendait le soir du 1er septembre à Donchery pour négocier avec M. de Mollke, M. de Bismarck et le général de Blumenthal ! Dès le premier moment d’ailleurs il n’y avait aucune illusion à se faire. M. de Moltke se montrait le ministre froid et implacable de la force victorieuse dictant ses volontés. Les conditions étaient dures : l’armée prisonnière de guerre avec armes et bagages, les officiers gardant leurs armes, et prisonniers comme la troupe. Vainement Wimpfen cherchait à se débattre, invoquant le courage de son armée, les ressources