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suffisante pour imposer la paix. On arrivera ainsi à perfectionner l’exploitation, et c’est ce qui a le plus d’intérêt pour le public. Le public n’admet pas que, pour ne pas s’être entendues, deux compagnies lui infligent l’obligation de s’adresser à deux gares distinctes, quand une gare commune pourrait être établie, ou l’ennui d’une attente, qu’il croit prolongée à dessein, pour la correspondance entre des trains qui appartiennent à des entreprises ennemies. Le commerce souffre plus encore, pour le mouvement des marchandises, des transbordemens coûteux et lents qui résultent de la séparation des gares et du défaut d’entente amiable. Ces inconvéniens subsistent, assure-t-on, sur certains points, où le service se ressent de l’hostilité qui existe entre les compagnies, hostilité à laquelle le public, qui veut avant tout un transport commode, exact et direct, entend n’être pas associé. Il dépend des fonctionnaires de l’état de prescrire les dispositions nécessaires pour y mettre ordre, de régler équitablement les conditions et les dépenses d’un service qui doit être fait en commun et de supprimer ainsi l’un des griefs que l’on exprime contre le mode d’exploitation de nos voies ferrées.

Il faut maintenant considérer l’ensemble. Malgré les services qu’elles rendent, les grandes compagnies ne sont point partout en possession de la popularité. On les critique parfois avec passion ; on exigerait d’elles l’impossible, et l’on rend le gouvernement responsable des lacunes et de l’insuffisance qui peuvent se produire, sur certains points et à certains momens, dans la circulation. Les plaintes sont d’une exagération manifeste ; on aurait tort cependant de les dédaigner, car l’impopularité est très nuisible pour les grandes entreprises comme pour les gouvernemens, et les institutions qui sont protégées par la loi, les industries privilégiées, ont des obligations plus étroites. Or, sans faire chorus avec les opposans systématiques, il est permis de rechercher si l’exploitation de nos voies ferrées a réalisé les progrès que l’on est en droit d’attendre. La réponse à cette question est négative. Depuis vingt ans, les perfectionnemens dans le service ne sont pas apparens, et pendant cette période il y a eu à l’étranger des améliorations sensibles : c’est ce qu’attestent les rapports de MM. Ch. de Franqueville et Malezieux, c’est ce que n’ignorent point les compagnies, car elles sont trop intelligentes pour ne point se tenir au courant des réformes qui s’accomplissent dans leur industrie, et les fonctionnaires distingués, capables de procéder avec compétence à ces utiles enquêtes, ne leur font point défaut.

« Il est certain, dit M. de Franqueville, que l’ensemble du service de l’exploitation est en général plus satisfaisant en Angleterre qu’en France à tous les points de vue, celui de la sécurité excepté. »