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caractère de ne rien donner à l’apparence et de se contenter d’une réalité modeste, mais sérieuse. Le service actif ne comporte qu’un petit nombre d’années, en revanche il ne tolère pas ces congés anticipés qui font une règle de l’exception, et laissent seulement l’illusion d’une nombreuse réunion d’hommes sous les armes. Les prévisions de la défense nationale ne réclament pas des soldats libérés un nouveau service de plus de deux années, et à trente-deux ans chacun peut se dire qu’il a rempli tous ses devoirs ordinaires envers le pays ; mais viennent de graves événemens, des catastrophes imprévues, est-ce que dans ces cas suprêmes toute législation antérieure ne serait pas abrogée de fait, et remplacée, s’il le fallait, par les mesures qu’imposent à chacun les besoins immédiats du salut public ? Les longues années de réserve, qui forment le point distinctif de la loi militaire autrichienne, si elles sont utilisées suffisamment à maintenir l’instruction militaire, compenseront avec avantage pour les autres emplois du temps dans les professions civiles ce que le service actif et ce que le service de la défense nationale présenteraient de trop écourté ; les finances de l’état, et c’est là ce qui nous occupe, en tireront grand profit.

La conclusion est assurément facile à tirer de ces chiffres, de l’exposé de cette politique sensée et des actes du gouvernement d’un souverain qui, par son esprit solide, son caractère généreux, sa vie simple et digne, a droit au respect sympathique, non-seulement de ses sujets, mais de tous les hommes. Frappée par les coups redoublés de la mauvaise fortune, l’Autriche-Hongrie s’est repliée sur elle-même et a cherché dans les satisfactions intérieures du pays plus que l’oubli de l’amoindrissement de son rôle au dehors, mais encore une puissance non moins solide que dans l’état antérieur, et elle a, ce nous semble, réussi à l’obtenir. Si elle demeure privée de ses possessions italiennes, causes de plus de difficultés que de grandeur, elle a repris vers l’Orient son poste de pionnier de la civilisation européenne. Elle y occupe aujourd’hui presque exclusivement la place que se partageaient avec elle la France et l’Angleterre. Du côté de l’Allemagne, si elle a perdu la couronne impériale, elle a conquis aux yeux des princes et des peuples le prestige, inconnu pour elle, d’un gouvernement libéral, modéré, vers lequel les opprimés et les faibles tournent leurs cœurs et leurs vœux : situation nouvelle et heureuse qui réjouit et touche à la fois ceux qui ont souvent visité les différentes provinces de l’empire de l’Est, comme il s’appelle, habitées par des races vives, belliqueuses et fières, religieuses et douces ; exemple consolant du bien rapide qui se produit, l’orage une fois passé, par l’accord des différentes