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Entre Laroche et Montereau, dix-sept barrages mobiles avec écluses maintiennent le mouillage à une hauteur telle que des bateaux de fort tonnage peuvent cheminer avec une égale facilite dans les deux sens, sauf aux époques de grandes crues. Le canal de Bourgogne, qui se trouve ainsi débloqué, servira désormais à l’industrie des transports mieux qu’il ne l’avait fait jusqu’à ce jour. Au-dessus de Laroche et jusqu’à Auxerre, le projet d’amélioration de l’Yonne comporte neuf barrages, qui ne sont pas achevés ; aussi le canal du Nivernais ne peut-il rendre jusqu’ici les services que l’on en attend. De Montereau à Paris, la marine a plus d’importance encore, d’abord parce que les deux rivières qui se réunissent à Montereau lui apportent chacune leur contingent, et parce que le trafic augmente à mesure que l’on se rapproche de la capitale. Douze barrages écluses maintiennent un tirant d’eau de 1m 60 au minimum ; on reconnaît déjà qu’il est nécessaire d’y faire de nouvelles dépenses pour élever le mouillage à 2 mètres. Notons en passant que ces améliorations coûtent fort cher. Le prix d’établissement d’un barrage mobile avec hausses sur la Haute-Seine a varié de 600,000 francs à 1 million. L’ensemble de ces travaux, non moins utiles au commerce que remarquables au point de vue de l’art des constructions, ne laisse pas de léser quelques intérêts. Les longs trains de bois qui descendaient jadis à Paris au fil de l’eau s’accommodent mal d’une rivière canalisée ; les écluses les gênent, les barrages affaiblissent le courant qui les entraîne ; ils n’ont pas assez de consistance pour se faire remorquer. Il est donc probable que le flottage disparaîtra, comme tant d’autres industries de l’ancien temps que les progrès des voies de communication ont anéanties.

Au commencement de ce siècle, la Seine n’était pas navigable dans la traversée de Paris hormis un certain état des eaux qui ne se réalisait qu’à de rares instans dans le cours de l’année. Les bateaux chargés venant de l’amont s’arrêtaient au pont de la Tournelle ; ceux de l’aval ne dépassaient pas le port Saint-Nicolas. Pour remédier à cet inconvénient, la ville de Paris obtint du gouvernement, en 1802, l’autorisation de creuser à ses frais le canal Saint-Martin, qui part de la Bastille, s’élève au moyen de neuf écluses jusqu’à La Villette, où il reçoit les eaux du canal de l’Ourcq, et, sous le nom de canal Saint-Denis, redescend avec douze écluses à La Briche pour y rejoindre la Seine après un parcours de 11 kilomètres, tandis que le parcours en rivière n’en a pas moins de 27. Il en est résulté la création à La Villette d’un port intérieur dont le mouvement s’élève à 2 millions de tonnes par année ; autrement dit, ce port, — fait peu connu, — rivalise d’importance avec celui du Havre. Toutefois, comme cette voie navigable appartient maintenant à une