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L’APOCALYPSE DE L’AN 97


I.

La gloire propre du génie d’Israël, c’est le prophétisme. Ni par son culte, ni par ses lois, ni par ses mœurs, le peuple hébreu n’eut une grande supériorité sur ses voisins jusqu’au VIIIe siècle avant Jésus-Christ. L’inscription de Mescha. découverte il y a quelques années et que l’on peut dater avec une très grande approximation de l’an 898 avant Jésus-Christ nous montre ce roi de Moab dans un état religieux exactement semblable à celui de David. Au lieu de Chamos, dieu de Moab, mettons Jéhovah, dieu d’Israël, et l’inscription moabite nous représentera parfaitement la psychologie d’un vigoureux Israélite de Gabaa ou de Bethléem, peu mystique, intéressé, passionné, sans idée de récompenses ni de châtimens d’outre-tombe, ayant avec son dieu une sorte de contrat réciproque par suite duquel le dieu, en retour du culte qu’on lui rend, est obligé de faire réussir son fidèle dans toutes ses entreprises. Identification complète du dieu et de la tribu, lien étroit entre le dieu et un membre de la tribu qui est l’homme de son choix et à qui il donne la royauté, croyance à une inspiration permanente du dieu dictant par des songes ou des théophanies fréquentes ses volontés à son favori, victoire de ces dieux de tribu les uns sur les autres, si bien que tour à tour Jéhovah est traîné devant Chamos et Chamos devant Jéhovah, selon qu’Israël ou Moab l’emporte, voilà le tableau que nous présente le document capital trouvé à Dibon. C’est l’état commun des religions de la Palestine et des pays limitrophes avant l’apparition des grands prophètes en Israël.

Tout change quand, vers le milieu du VIIIe siècle avant Jésus-Christ, les nabis ou prophètes israélites, qui jusque-là n’avaient pas différé essentiellement de ceux des peuples voisins, se mettent à tenir école d’éloquence religieuse, morale, sociale, politique. Le jour