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agricole du continent européen n’a, par le fait, que trop abandonné la direction de l’Orient depuis que l’Amérique et les pays d’outre-mer lui ont ouvert les bras; il faudrait, pour qu’il la reprît, des encouragemens très positifs. Une petite colonie souabe, qui s’était formée, antérieurement à l’interdiction, près de Giurgévo, et que la fabrication du beurre avait rendue assez prospère, fut amenée par les tracasseries des communes environnantes à passer dans la Dobroudja, sur le territoire ottoman, et depuis lors l’immigration de l’Occident en Roumanie a un caractère exclusivement industriel et marchand. Il faut le dire, rien ne menace plus de retarder les progrès de la véritable civilisation sur le Bas-Danube, en Hongrie comme dans les autres pays riverains, que les méfiances exagérées causées par la surexcitation de l’esprit national, qui tend à diviser de plus en plus des races différentes, il est vrai, mais qui vivent côte à côte sur le même sol depuis des siècles. On a donc eu parfaitement raison de dire que, si l’Autriche n’existait pas, il faudrait l’inventer, en la regardant comme le noyau pacifique d’une grande confédération de toutes les petites nationalités de l’Europe orientale.

L’industrie ne joue encore qu’un rôle secondaire dans l’économie nationale de la Roumanie, si l’on excepte l’exploitation des mines de sel gemme, monopole de l’état. Plus du quart des ouvriers qu’il y emploie sont des condamnés. Les travaux se poursuivent aujourd’hui méthodiquement. Le sel le plus blanc et le plus pur est celui de Slanik. On estimait dès avant 1868 à plus de 70,000 tonnes de 1,000 kilogrammes le total de la production annuelle. Une partie est consommée dans le pays, une autre exportée en Turquie et en Serbie. Il en passe aussi par contrebande en Transylvanie et en Bessarabie. On peut fonder en outre sur la richesse des mines qui le fournissent de belles espérances pour l’avenir, au point de vue de la création d’industries accessoires, telles que la fabrication de produits chimiques. Le plus grand obstacle à surmonter pour en tirer davantage, c’est la difficulté du transport sur des chars à bœuf, mode auquel on fera bien, si ce n’est déjà fait, de substituer, dans le fond pierreux des vallées, des convois roulant sur des rails en bois, ou en fer. L’exploitation des sources de pétrole est encore moins développée.

L’industrie manufacturière ne compte qu’un très petit nombre d’établissemens isolés. La petite industrie, comprenant les métiers des villes, est plus répandue et beaucoup plus importante en somme, mais dans les campagnes presque toute domestique. Le paysan construit lui-même sa maison et façonne la plupart des outils et des ustensiles dont il se sert, fabrique des tapis en poil de chèvre en hiver, et tresse des nattes en jonc ainsi que des paniers. Les femmes