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bientôt il n’y eut plus en France d’autre volonté que la sienne. Aux termes de la loi du 28 pluviôse, qui complète la constitution du 22 frimaire, la municipalité de commune reparaît, mais elle n’est plus reconnaissable. Il y a bien un maire, des adjoints et des conseillers municipaux, mais il n’est plus question d’élection. C’est le premier consul ou le préfet, son délégué, qui nomme les uns et les autres. Le rôle du conseil municipal devient tout à coup des plus modestes : il ne s’assemble plus qu’une fois l’an. Ses pouvoirs semblent se borner au partage des affouages et des fruits communs entre les. habitans de la commune. « Il entend, dit la loi de pluviôse, et peut débattre le compte des recettes municipales que le maire rend au sous-préfet. » On voit que le pouvoir exécutif en prend à l’aise avec le conseil que cependant il nomme lui-même ; il se réserve de le consulter quand il le juge à propos, il accepte son concours quand il s’agit d’aggraver les charges de la commune, mais au besoin il s’en passe.

Les choses allèrent ainsi pendant toute la durée du premier empire. La vie communale y fut nulle, dominée qu’elle était par la toute-puissante administration de Napoléon. Ces victoires, ces conquêtes prodigieuses, qui remplissaient le monde alors et qui rempliront toujours l’histoire, parce qu’elles représentent moins les surprises de la force que les improvisations du génie, se traduisaient, il faut bien le dire, pour les pauvres communes en sacrifices de toute sorte : et pourtant c’est à peine si dans les dernières années, quand vint la période des revers et de l’invasion, on commença d’y sentir, les protestations et les résistances. Lorsque l’étranger parut, il n’en fut pas moins rudement accueilli, et les populations ne voulurent pas, escomptant la fin de leurs maux, faciliter la tâche à l’envahisseur.

Sous la restauration, régime de paix et de libre discussion, les mœurs libérales ne tardèrent pas à se former et à pénétrer peu à peu dans les institutions. Cependant il ne paraît pas que les franchises municipales aient été réclamées avec autant d’ardeur que d’autres. L’attention du pays se portait surtout sur les luttes de la presse et de la tribune, et ce furent les libertés de la tribune et de la presse qui profitèrent les premières de la marche de l’esprit public. Toutefois les questions municipales n’échappèrent pas à la sollicitude des chambres, non plus qu’à celle du gouvernement. Un projet de loi fut présenté par le ministère à la chambre des députés en 1821, mais il n’aboutit pas[1]. Un autre projet, déposé par

  1. On lit dans le préambule de l’ordonnance du 8 août 1821 : « Louis, etc. Nous avions voulu, dans le projet de loi relatif à l’organisation municipale présenté à la chambre des députés dans la dernière session, donner plus de latitude et de liberté à l’action des administrations locales. Ce projet n’ayant pu être discuté, et devant être de nouveau présenté dans une autre session, etc. » Suit le texte de l’ordonnance décentralisatrice qui transporte du ministre au préfet l’approbation des délibérations des conseils municipaux.