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PUBLICATIONS NOUVELLES SUR L'HISTOIRE D'ESPAGNE


En présence des agitations qui troublent l’Espagne contemporaine, l’histoire du passé de ce noble pays offre un intérêt mêlé de regrets : il y a pour l’esprit un singulier contraste à se rappeler quelle fut sa grandeur, on étudie volontiers à nouveau comment et par quels dramatiques épisodes cette grandeur s’est ébranlée, puis a déchu. C’est le problème, toujours instructif, que deux récentes publications remettent en lumière.

Il y a d’abord, si nous voulons suivre l’ordre des temps, le volume que viennent de donner MM. Loiseleur et Baguenault de Puchesse sur l’Expédition du duc de Guise à Naples en 1647[1]. Les deux auteurs ont entrepris de raconter ce curieux épisode avec le secours de documens tout à fait inédits. Ils ont trouvé, sans aller plus loin, dans la bibliothèque de la ville d’Orléans une série considérable de dépêches qu’avait adressées le comte de Brienne, chargé par Mazarin des relations extérieures, au marquis de Fontenay-Mareuil, notre ambassadeur à Rome, chargé de diriger cette grande aventure. Ces papiers venaient du couvent bénédictin de Bonne-Nouvelle, à Orléans, où les avait déposés, en se faisant moine à l’âge de seize ans, le fils d’André Félibien. Ce dernier, l’auteur bien connu des Entretiens sur les vies des plus excellens peintres, avait été d’abord secrétaire du marquis de Fontenay, et était resté dépositaire de ces pièces, dont le comte de Brienne, probablement par scrupule diplomatique, ne s’est pas servi dans ses Mémoires. Les éditeurs ont ajouté un grand nombre de documens provenant soit des archives de notre ministère des affaires étrangères, soit du département des manuscrits de notre Bibliothèque nationale. Ils ont publié de la sorte, au nom de la Société archéologique de l’Orléanais, un recueil de 400 pages ne contenant que des pièces inédites, et précédé d’une intéressante introduction, qui analyse avec soin et avec intérêt tout le volume. Il n’est que juste de rappeler qu’ils ont été aidés, en vue de cette publication, par les subsides et les conseils de l’utile Comité des travaux historiques, institué auprès de notre ministère de l’instruction publique.

Le souvenir de la singulière entreprise du duc de Guise à Naples nous reporte à une très grave époque de l’histoire d’Espagne. Dès lors était commencé, sans retour possible, ce mouvement de décadence qui avait suivi de si près le moment de l’extrême puissance. La France n’avait cessé de poursuivre la guerre contre un ennemi devenu et resté très redoutable ; on était à la fin de la guerre de trente ans, déjà les négociations étaient engagées à Munster et à Osnabrück : Mazarin allait recueillir les fruits de l’habile politique de Richelieu, des victoires de Condé et de sa

  1. Un vol. in-8o ; Paris 1875, Didier.