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le droit et le devoir de faire des lois pour en régler la répartition. Le premier pas à faire, pour arriver à la transformation de la société, est d’obtenir une loi qui limite l’extension de la propriété immobilière, et qui, par l’application de l’impôt progressif, limite et arrête l’accumulation des capitaux et de la richesse mobilière entre les mêmes mains, en les rendant improductifs pour les détenteurs. Le second pas, qui consommera la révolution sociale, sera de faire rentrer toute propriété, tout capital, toute industrie dans le domaine de l’état, qui en réglera l’exploitation dans l’intérêt de la collectivité, et en répartira les produits. Comment arriver à cette transformation sociale, et faire modifier les lois qui régissent la propriété ? Il faut, en premier lieu, entretenir et rendre incessante la guerre contre le capital, afin de restreindre les profits de celui-ci et même, s’il se peut, le rendre improductif. Il faut, en second lieu, par l’union de tous les ouvriers, faire pénétrer dans les législatures des états et jusque dans le congrès des travailleurs qui y professent et y fassent prévaloir les doctrines de la Fédération. Il faut donc que les ouvriers se dégagent de toute affiliation avec les vieux partis politiques, pour constituer un parti nouveau et indépendant, le parti des travailleurs. Dans les collèges où ils ne seront pas assez forts pour emporter l’élection, ils mettront des conditions à l’obtention de leurs suffrages, et ils exigeront l’engagement de voter pour certaines mesures.

Ainsi est né le « parti des travailleurs, » qui a déjà fait son apparition dans plusieurs des états de l’ouest et qui va essayer de jouer un rôle dans les élections législatives de cet automne. L’organisation en est activement poussée dans les grands centres ; elle est calquée sur l’organisation ordinaire des partis aux États-Unis. Les adhérens d’un même quartier se réunissent et font choix d’un délégué ; la réunion des délégués de quartier constitue le comité métropolitain qui désigne les candidats municipaux, et délègue un de ses membres au comité général de l’état, lequel reçoit directement et transmet les instructions du comité central ou dirigeant. Il est pourvu aux dépenses des comités et aux frais de déplacement des délégués au moyen des cotisations mensuelles de tous les adhérens. Les cotisations que les ouvriers américains paient pour les diverses associations dans lesquelles ils s’engagent finissent par absorber une partie assez importante de leur salaire ; mais c’est la dépense qu’ils acquittent le plus exactement, et ils ne font pas le compte du capital que représentent, au bout de quelques années, ces contributions improductives.

Il n’est point de parti, aux États-Unis, point d’association un peu étendue, point d’œuvre de quelque importance qui ne soit représentée dans la presse par quelque organe spécial. La Fédération