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soleil n’occupe point le premier rang dans le monde. C’est un astre déjà vieilli, assez avancé dans son refroidissement et dont la lumière jaunâtre commence à se rapprocher de la couleur des flammes.

En résumé, comme quantité et qualité, la lumière électrique dépasse de beaucoup celles des flammes, et comme éclat elle approche ou même dépasse celui du soleil. Or c’est précisément cette immense profusion de pouvoir éclairant qu’on reproche à la lumière électrique. On se dit qu’elle est exagérée, qu’elle dépasse nos besoins, qu’elle embarrasse par son excès, qu’il faudrait la diviser, et l’on soutient qu’elle n’est pas divisible. Les gens qui tiennent aux vieilles habitudes, que le progrès effraie par instinct, et ces gens sont nombreux dans notre pays, ne voient dans cette splendeur et dans cet éclat qu’un nouveau motif de répulsion. « Quand vous regardez la lumière électrique, disent-ils, vous voyez tout autour comme les rayons divergens d’une auréole céleste ; puis, après la contemplation de ce point lumineux, il reste dans la vue des taches de toutes couleurs qui semblent se promener dans l’espace ; on n’y échappe point en fermant les yeux, c’est une véritable cécité, momentanée sans doute, mais il n’est pas sans exemple qu’elle ne devienne éternelle. L’un des plus éminens physiciens de la Belgique, M. Plateau, a payé par la perte totale de la vue les observations qu’il a trop longtemps continuées sur ces couleurs accidentelles. » J’accorde tout cela ; la lumière électrique a les mêmes dangers que celle du soleil : il faut s’éclairer par elle, il ne faut point la regarder. Est-il bien certain d’ailleurs qu’on ne puisse ni diviser la lumière électrique ni réduire son éclat jusqu’à le rendre tolérable ? C’est ce que nous allons voir.

Pour ce qui est de l’éclat, rien n’est plus facile que de le réduire autant qu’on le veut ; il suffit de couvrir la flamme avec un gros globe opalescent. Celui-ci la cache, reçoit tous les rayons qu’elle émettait et les disperse absolument comme s’il était lumineux lui-même. Il ne fait rien que se substituer à la source première, mais en l’agrandissant, et s’il est dix mille fois plus étendu qu’elle, il réduit son éclat au dix-millième ; comme rien ne limite sa grosseur, rien ne limitera cette réduction, qu’on peut continuer jusqu’à satisfaire les rétines les plus susceptibles. A la vérité, ce procédé absorbe et anéantit une notable portion de la lumière émise ; mais, quand on est riche, il ne faut pas regarder à la dépense, et un peu de prodigalité ne messied pas.

Voyons maintenant ce qui concerne la divisibilité de l’arc. Il y a longtemps que M. Le Roux a imaginé un mode de division fort ingénieux qui consiste à diriger alternativement le courant d’abord