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été pratiqué jusqu’ici, ne peut se faire qu’au moment de l’ascension de la sève; c’est alors que l’adhérence entre l’écorce et le bois est le moins grande et qu’au moyen de deux incisions circulaires réunies par une incision longitudinale, on peut le plus facilement les séparer; mais ce moment est fort court, car la sève s’arrête dès que le temps se met au sec; aussi les ouvriers en profitent-ils pour exiger des salaires très élevés. Ce n’est pas tout, la sève dans le nord de la France ne se met en mouvement qu’au mois de juin, quelquefois même plus tard; il faut alors retarder les exploitations jusqu’au milieu de l’été, ce qui diminue la puissance reproductive des souches et fait perdre la valeur d’une feuille, puisque si le bois avait été coupé au printemps, la sève perdue aurait produit une pousse, ou une feuille pour nous servir du terme technique. Pour remédier à ces inconvéniens, M. Maitre a inventé un appareil, perfectionné depuis par M. Nomaison, qui permet d’écorcer le bois en tout temps. Cet appareil se compose d’une chaudière verticale, tubulaire et cylindrique avec foyer intérieur et réservoir d’eau entourant la boîte à fumée. La vapeur, chauffée à 170 degrés, est amenée par des tubes dans les récipiens hermétiquement clos où se trouvent les bois débités à la longueur ordinaire. Après un contact d’une heure et demie environ, l’écorce se gonfle et se détache avec la plus grande facilité, lors même que le bois aurait plusieurs mois de coupe. Cette écorce, convenablement séchée, est aussi bonne que celle qui est récoltée en sève et coûte à peu près le même prix. Mais le véritable bénéfice de cette invention est pour le propriétaire, qui peut écorcer ainsi des bois qu’il aurait laissés intacts, et qui peut faire ses exploitations en temps opportun et sans nuire à la végétation de son taillis.

Le hêtre est après le chêne la principale essence feuillue de nos forêts ; son bois, d’un tissu homogène, d’un grain fin, facile à travailler, présente une grande résistance à la compression, à l’extension et à la flexion, mais il résiste mal aux alternatives de sécheresse et d’humidité, et, lorsqu’il est sous un gros volume, il est sujet à se fendre et à gauchir; aussi n’est-il pas propre à la charpente ; par contre, il est utilisé dans les travaux hydrauliques comme pilotis et surtout comme traverses dans les constructions de chemins de fer; mais il faut que ces traverses soient mises à l’abri d’une décomposition trop rapide par l’injection d’une substance antiseptique. Celle qu’on emploie de préférence est une dissolution de sulfate de cuivre, dans la proportion de 1k 500 de sel pour 100 kilogrammes d’eau, qu’on fait pénétrer dans le bois au moyen de la pression. Les tronces de hêtre encore vertes, munies de leur écorce et découpées à la longueur de deux traverses, sont rangées dans un chantier; l’une des extrémités de ces tronces est