Page:Revue des Deux Mondes - 1879 - tome 33.djvu/600

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Henri IV fit plus tard conclure le mariage de Catherine de Rohan avec le duc de Deux-Ponts, Jean de Bavière, prince palatin[1].

M. Du Plessis fut le négociateur de ce mariage, à la prière du père du jeune duc. Le père mourut avant que le mariage ne fût accompli ; « mais par la dextérité de M. des Bauves, fils de M. Du Plessis, qui se trouva sur les lieux, il fut conduit a fin premier qu’il sceust le décez de son père ; parce que retournant en Allemagne, la chose encor en son entier, il y eust trouvé de contraires conseils au préjudice des promesses de part et d’autre avancées[2]. » Henri IV créa M. de Rohan duc et pair dès qu’il fut de retour en France : Rohan fut reçu pair de France le 7 août 1603 et prêta serment à la cour, accompagné de beaucoup de noblesse protestante ; M. Bouthelier fut son avocat[3].

Il semble qu’un nuage ait un moment passé sur l’amitié que Henri IV témoignait au jeune duc. Voici ce que M. de Villeroy écrivait à Sully le 3 juillet 1604 : « Un nommé Durand, né à Genève, qui se dit sieur de Hautefontaine, a été envoyé en Angleterre il y a quelques jours par M. le duc de Rohan, pour y conduire et présenter au roi dudit pays un cheval de la part dudit duc, lequel s’est embrouillé en des pratiques préjudiciables au service du roi et y a semé de très mauvaises graines, abusant du nom dudit duc, lequel sa majesté ne peut croire avoir donné charge audit Durand de faire telles pratiques, jusqu’à proposer de le marier en Angleterre et le faire passer audit pays pour cet effet, puisqu’il n’en a fait avertir sa majesté et ne luy en a demandé la permission : car encore qu’il y ait envoyé ledit cheval sans congé, ce qu’il ne devait faire, sa majesté n’estime pas qu’il ait entrepris le reste sans sçavoir sa volonté, néanmoins sa majesté désire que vous mettiez peine d’apprendre par delà la vérité, ayant opinion qu’il pourrait bien aussi s’estre laissé aller à faire cette faute par le conseil de M me sa mère, de laquelle sa majesté dit que vous connaissez la portée comme elle fait[4]. »

Sully était en Poitou quand Henri IV l’avertit des projets de mariage formés par Mme de Rohan pour son fils ; il alla à Saint-Jean et à Brouage, où il fut reçu par MM. de Rohan et de Saint-Luc. Sully parla à Rohan de tout ce que Villeroy lui avait mandé, « sur lequel discours il fit paraître d’estre étonné et encore plus de pouvoir découvrir qui m’avait pu faire ce rapport, duquel il y avait, ce me dit-il, quelque chose de véritable ; mais tout le surplus entièrement faux et supposé et qu’il fallait que ce fût quelque sien enemy

  1. La date du traité de mariage est le 14 octobre 1602.
  2. Histoire de la vie de messire Philippe de Mornay, seigneur Du Plessis-Marly. Leyde, 1647, p. 303.
  3. Journal d’Henri IV, t. III, p. 114.
  4. Économies royales. Sully, t. II, p. 248.