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coup les garanties libérales et les croyances religieuses. L’article 7, qu’est-ce que l’article 7 ? Cela ne suffit pas. Tandis que M. Jules Ferry allait en province faire de la propagande pour ses lois, M. Louis Blanc entrait en campagne à son tour, organisant une agitation pour l’amnistie plénière, reprenant les prédications d’un socialisme suranné, élevant le drapeau de la république conventionnelle contre la république de la constitution. Une fois ce mouvement engagé, on ne s’est plus arrêté. Il y a eu comme une émulation d’excentricités, de déclamations violentes et d’illégalités, une épidémie de démagogisme bruyant. Les revendications pour l’amnistie plénière sont devenues une réhabilitation de la commune, accompagnée d’outrages contre l’armée, contre la magistrature, contre M. Thiers, contre tous ceux qui ont contribué à dompter l’effroyable insurrection de 1871. De malheureux graciés rentrant en France après huit ans d’expiation et en grande partie disposés à se faire oublier ont été tout à coup traités en héros de la vraie république et fêtés comme des soldats revenant de faire campagne pour leur pays. On a offert au public la mise en scène du retour triomphal des exilés, et dans quelques quartiers de Paris, de Lyon, il s’est trouvé aussitôt des électeurs pour envoyer des amnistiés dans les assemblées locales en attendant de les envoyer au parlement. M. le président du conseil municipal de Paris, au lieu de rester dans son rôle, a, bien entendu, saisi l’occasion de faire son discours politique pour signifier son opinion aux pouvoirs publics, et le conseil général de la Seine, à son tour, sortant de ses attributions, s’est empressé de jouer au petit parlement, de voter pour l’amnistie plénière. Sur d’autres points de la France, des maires, des fonctionnaires, ont paru plus ou moins s’associer à ce mouvement et ont fait cortège à M. Louis Blanc ou à M. Blanqui.

C’est une contagion d’anarchie à la surface de certaines régions, et, comme pour compléter le tableau, un congrès ouvrier, réuni à Marseille, est venu mêler sa voix au concert des revendications. Ces naïfs énergumènes, sous prétexte de s’occuper des intérêts des ouvriers, sont occupés depuis quelques jours à régénérer la société. Ils suppriment tout, le capital bourgeois, la rente, les impôts, l’armée, la magistrature, le culte ; ils promulguent l’évangile révolutionnaire, la propriété collective, la représentation des prolétaires, les lois humanitaires de l’avenir. Ils suppriment et ils promulguent, c’est-à-dire ils se livrent à tour de rôle aux divagations d’esprits troublés ou irrités. Tout cela est encore là république, ou du moins, au dire de certaines gens, fait partie de la république. C’est la politique républicaine, le progrès républicain !

Ce n’est point sans doute qu’on doive rien exagérer et se laisser émouvoir outre mesure. Assurément, ces agitations, en partie favorisées par le désœuvrement des vacances, par un certain relâchement d’autorité, par la dispersion momentanée du gouvernement, ces agitations