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L'EMPIRE DES TSARS
ET LES RUSSES

VII.[1]
LA PRESSE ET LA CENSURE.

Dans les états modernes, il existe une puissance redoutable, pareille à certains Titans de la fable, un géant aux cent bras, pourvu de mille yeux et de mille bouches, qui spontanément, gratuitement, se charge de veiller à l’exécution des lois, de découvrir et de dénoncer au pouvoir comme au public les abus de toute sorte, et l’apparence même d’un abus. Cet Argus infatigable, c’est la presse, qui au don d’ubiquité semble joindre le don d’être invisible, la presse qui, avec tous ses défauts et ses vices mêmes, est le contrôle actif et journalier de tous et de chacun sur les actes du pouvoir et des agens du pouvoir. Or si les réformes de l’empereur Alexandre II n’ont pas donné aux Russes tout ce qu’ils paraissaient en droit d’en attendre, une bonne part de leurs déceptions est imputable à la situation faite chez eux à cet inspecteur volontaire, à ce contrôleur sans mandat des pays modernes. L’état légal de la presse explique beaucoup des défauts de l’administration et de la justice, explique bien des contradictions des lois et des mœurs, et l’impuissance même du gouvernement à faire le bien qu’il décrète.

  1. Voyez la Revue du 1er avril, du 15 mai, du 1er août, du 15 novembre, du 15 décembre 1876, du 1er janvier, du 15 juin, du 1er août et du 15 décembre 1877, du 15 juillet, du 15 août, du 15 octobre, du 15 décembre 1878, du 1er mars, du 15 mai, du 1er septembre 1879.