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brillantes généralités oratoires, dans les chaires spéciales, du Collège de France il faut des hommes spéciaux. Je demande donc ce que les secrets de l’épigraphie grecque ont de commun avec le clair-obscur et ce que peut connaître de l’art de peindre, que ce qu’en connaît tout le monde, un véritable archéologue. Il faut pourtant bien que la peinture ait sa place, elle aussi, dans le cadre d’une histoire de l’art.

Qu’adviendrait-il donc de la chaire de M. Charles Blanc si l’on y mettait M. Olivier Rayet ? De deux choses l’une. Ou bien M. Rayet la transformerait en une chaire d’histoire de l’art grec, dont nous n’avons que faire, puisque déjà nous en avons plusieurs. Mais plutôt alors que l’on nous donne la chaire de zend ! Au moins représenterait-elle, en effet, dans le haut enseignement, quelque chose dont la représentation est plus ou moins utile, mais qui jusqu’ici n’y était pas représenté. Ou bien encore, dans l’autre alternative, nous verrions M. Rayet, abandonnant l’archéologie grecque, passer de l’antique au moderne, du déchiffrement de ses inscriptions à la lecture des vieux diplômes et des vieilles chartes italiennes, de la sculpture à la peinture, de ce qu’il sait faire, et bien faire, à ce dont il ne sait pas lui-même, ni nous non plus, comment il se tirerait. Mais alors qu’il cède donc la place à ceux qui n’auront pas besoin, comme lui, pour la remplir, de commencer par rompre avec leurs études et abjurer leur spécialité. Et qu’il n’en advienne pas de la chaire d’esthétique et d’histoire de l’art, comme il en est advenu déjà deux fois en cinq ou six ans de la chaire d’histoire de la littérature française. On y avait mis M. Paul Albert, professeur de littérature latine, en vertu de cette fiction qui veut que deux sortes d’hommes, les avocats et les élèves de l’École normale, soient prêts à tout, propres à tout, bons à tout. Il meurt, et de nouveau la chaire est vacante. Trois candidats sont en présence. Il en est un qui depuis plus de vingt ans a consacré les loisirs que lui laissait le plus pénible et le plus laborieux enseignement à l’étude unique, exclusive, ininterrompue de la littérature française. Est-il besoin de le dire ? C’est celui que l’on élimine tout d’abord, et à peu prés unanimement. On en nomme un dont le meilleur titre est un assez bon livre sur Aristophane, et celui qui vient en seconde ligne, c’est pour avoir plus particulièrement écrit sur Sterne, sur Shakspeare, sur Goethe ! Si quelque jour la chaire de Langues et littératures de l’Europe méridionale vient à vaquer, je lui conseille d’entrer en ligne ; c’est immédiatement lui que l’on choisira.

Le vrai concurrent de M. Müntz, ce ne saurait donc être M. Rayet, — à moins que l’on ne commence par rapporter la décision prise de conserver la chaîne d’esthétique et d’histoire de l’art telle quelle, — c’est M. Lafenestre. M. Müntz a sur M. Lafenestre un avantage, qui est d’avoir déjà beaucoup publié, comme nous le rappelions tout à l’heure, et cet avantage est considérable. En effet, ses titres sont là, comme