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femmes sont admises ; éducation religieuse assurée aux membres des diverses communions. En 1871, réforme du système de recrutement dans l’armée, abolition de l’achat des grades. En 1872, établissement du scrutin secret, depuis si longtemps réclamé pour protéger le vote du fermier contre la pression du propriétaire ou de ses agens. La même année, abolition des sermens universitaires, qui privaient les catholiques du droit de prendre leurs grades à Oxford et à Cambridge ; abolition d’une loi vexatoire et impuissante qui interdisait aux évêques catholiques d’Angleterre de porter publiquement leur titre ; adoucissement de la législation sur les trades unions ; création enfin d’un bureau de l’administration locale, dans les mains duquel vont être concentrées un certain nombre d’attributions jusqu’alors mal à propos dispersées. C’était une fièvre de réformes. Jamais on n’avait rien vu de pareil depuis le grand ministère de lord Grey, en 1830. On commençait à trouver que Gladstone allait un peu vite. L’Angleterre n’est pas habituée à marcher d’un tel pas ; elle aime à respirer après chaque réforme. On ne lui laissait pas le temps de souffler ; elle finit par demander grâce. On ne l’écouta pas ; elle se fâcha.

C’était en 1873 : cinq ans s’étaient écoulés depuis que Gladstone était arrivé triomphalement au pouvoir, précédé par un splendide programme de réformes, escorté par une majorité formidable dans la chambre et dans le pays. Dans l’intervalle, une révolution avait eu lieu sur le continent : la république en France avait succédé à l’empire. Au milieu des circonstances mémorables qui accompagnèrent ce grand événement, il ne parut pas que le cabinet Gladstone eût fait jouer à l’Angleterre un rôle digne d’elle. Ce fut du moins l’opinion générale, et les adversaires du ministère ne manquèrent pas d’en tirer avantage contre lui. Par le traité de Versailles, le statu quo en Occident était changé au profit de l’Allemagne ; par la conférence de Londres, le statu quo en Orient était changé au profit de la Russie. Dans les deux cas, le cabinet Gladstone avait été sans action sur les événemens.

Il est rare que de graves événemens se passent sur le continent, et notamment en France, sans avoir un contre-coup en Angleterre. Nous l’avons constaté plus d’une fois dans la suite de ces études. Il serait injuste de rattacher à la révolution du 4 septembre l’agitation rurale qui se manifesta en 1872 dans certains comtés de l’Angleterre sous la direction de Joseph Arch et qui se traduisit par des grèves, des réunions, des discours empreints d’une sorte de socialisme mystique ; cette agitation a un caractère tout à fait local et tout à fait anglais. Il n’en est pas de même du mouvement d’opinion qui eut pour conséquence la formation d’un petit groupe