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plus coûteuse pour recevoir des pensionnaires, l’augmentation des frais est couverte par des bénéfices que ne donneraient pas de simples externes. M. Bréal a raison de préférer la multiplication des collèges à l’extension démesurée d’un petit nombre d’établissemens et de nous proposer, sur ce point comme sur beaucoup d’autres, l’exemple de l’Allemagne, mais il a tort de compter sur la suppression des internats pour faciliter cette réforme, qui est d’ailleurs en voie de réalisation par la création projetée de plusieurs lycées dans l’intérieur et dans la banlieue de Paris.

La question des internats a été parfaitement posée par M. Jules Simon. Il n’a pas pour ces établissemens la tendresse de M. Bouillier ; il condamne avec non moins de force que M. Bréal « la vie claustrale imposée à nos enfans ; » il fait appel à l’opinion publique aussi bien qu’à l’Université pour encourager l’imitation des systèmes d’éducation scolaire en vigueur dans d’autres pays ; mais, tant que les familles auront besoin de grands pensionnats ou continueront à les préférer, il se résigne à l’ajournement d’une réforme qui n’aurait pour effet que de « remplacer tout simplement les pensionnats universitaires par l’industrie des particuliers et la règle par l’aventure. » Tous les vices que l’on peut justement reprocher aux internats des lycées leur sont communs avec les autres pensionnats, et ils sont corrigés ou atténués dans les premiers par des garanties d’une bonne et scrupuleuse administration sur lesquelles on ne saurait compter au même degré dans les seconds.

En dehors des internats universitaires, les familles n’ont le choix qu’entre trois sortes de pensionnats : les petites pensions, les grandes institutions laïques et les collèges ecclésiastiques. Les petites pensions se rapprochent davantage de la famille et, à ce titre, elles mériteraient d’être préférées ; mais celles qui, sous tous les autres rapports, peuvent soutenir la comparaison avec les établissemens de l’état, coûtent très cher et ne peuvent convenir aux fortunes moyennes. Les grandes institutions laïques sont des lycées libres : elles n’évitent aucun des inconvéniens qui résultent d’une grande agglomération d’élèves et elles y joignent les dangers propres à toute entreprise mercantile. Les mieux tenues ne sont pas inférieures aux meilleurs lycées ; mais, dans l’ensemble de ces établissemens, et surtout s’ils devaient se multiplier pour remplacer les internats publics, combien de fois ne pourra-t-il pas arriver, comme le dit M. Jules Simon, « qu’un déficit soudain dans les recettes, ou un désir de gain immodéré, ou quelque idée fausse passant par la cervelle du chef de la maison compromettent le succès des études, la santé des élèves ou, ce qui est plus grave, leur moralité ! » Les collèges ecclésiastiques sont à l’abri de pareils dangers. La direction,