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L’ÉGYPTE
ET
LE CONTRÔLE ANGLO-FRANÇAIS

Que la France ait des intérêts en Égypte, intérêts majeurs, multiples, urgens, est-il besoin de le démontrer ? Pour nous, ce serait faire injure à nos lecteurs que de le supposer. Il faut la complication de notre situation politique, les divisions et les calculs égoïstes de nos partis, l’incohérence et la débilité de nos gouvernails pour laisser mettre en doute une vérité aussi manifeste, et nous exposer à perdre de propos délibéré le fruit de plus de cinquante ans d’efforts, dans le seul coin du monde peut-être où, sous tous ses gouvernemens, la France ait eu une politique suivie et toujours d’accord avec elle-même.

Cette politique traditionnelle, on n’est pas surpris le la voir abandonnée des organes de l’extrême démocratie, des partisans de l’internationalisme ou de l’autonomie communale, de ceux dont l’horizon et le patriotisme ne dépassent pas toujours les murs de Paris. Ce qui est pénible, c’est de la voir reniée et désertée, de la voir immolée à de mesquines rancunes de partis, par les représentans attitrés des vieilles traditions françaises, par les héritiers des gouvernemens qui ont fondé l’influence de la France en Égypte, par les hommes qui sembleraient les défenseurs nés de tout le patrimoine de grandeur que nous ont légué nos ancêtres. En vérité, nos chambres sont loin de présenter à cette heure le même spectacle que le parlement anglais : les uns semblent se croire en droit de laisser abaisser le pays pour montrer l’impuissance de leurs adversaires au pouvoir ; les autres, absorbés