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quelques années plus tard, la suppression de la compagnie, sont parmi les événemens considérables du siècle. Mais nous croyons aussi que trop est trop. Deux gros volumes de plus, quand nous en avons déjà tant, c’est beaucoup, et surtout quand ces deux volumes ne nous apportent rien ou presque rien qui ne fut un peu partout ailleurs. Car, d’avoir publié pour la première fois la lettre de félicitations du chapitre de Notre-Dame à Christophe de Beaumont, archevêque nommé de Paris, ce ne sera sans doute pas ce que l’on voudra que j’appelle une acquisition pour l’histoire.

On peut regretter aussi que, dans le détail, la critique du P. Emile Régnault n’ait pas toujours toute la sûreté que l’on voudrait. Il eût peut-être mieux fait, pour ne viser que ce seul endroit, de laisser à MM. de Goncourt l’une de ces singulières inventions qu’ils ont importées du roman dans l’histoire, et de ne pas nous montrer après eux Mme de Pompadour « travaillant à la ruine de la religion par un plan arrêté avec les philosophes, ses amis et ses pensionnaires. » Mais notre étonnement de voir un peu plus loin M. Paul Féval invoqué comme une autorité en histoire n’a pu sans doute être égalé que par celui de l’auteur des Mystères de Londres, si toutefois il a lu le livre du P. Régnault. Nous n’avons guère été moins surpris à la rencontre de quelques expressions d’une familiarité trop vulgaire sous la plume du biographe d’un archevêque : « Les magistrats ne voulurent pas attendre à tirer pied ou aile d’une situation dont ils triomphaient, » ou encore : « Mme de Pompadour plus obstinée que jamais à en découdre avec le roi de Prusse, se montra ravie d’être débarrassée de Bernis. » On n’est pas habitué à voir ces façons d’écrire tomber de la plume d’un écrivain de la compagnie de Jésus, et j’en souffre pour cette réputation d’humanistes dont ils sont justement fiers. Mais n’insistons pas, et plutôt, reconnaissant que ce livre a dû coûter à son auteur beaucoup de temps et beaucoup de travail, consolons-nous de n’en avoir pas pu dire plus de bien en souhaitant que le P. Emile Régnault dépense sur quelque autre sujet, mieux choisi, les qualités de patience et de conscience dont ces deux volumes portent incontestablement témoignage.

Ce n’est pas pour le public, mais pour quelques parens et pour quelques amis, que M. Delahante avait rédigé d’abord les Notices qui forment aujourd’hui sous ce titre expressif : une Famille de finance au XVIIIe siècle, l’un des livres les plus intéressans et les plus instructifs en même temps que l’on puisse lire[1]. Nos amis ni nos parens mêmes, avec les meilleures intentions du monde, ne sont pas en

  1. Une Famille de finance au XVIIIe siècle. Mémoires, correspondances et papiers de famille réunis et mis en ordre, par M. Adrien Delahante, 2 vol. in-8o ; Paris, 1881 ; Hetzel.