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développer leurs entreprises. Les débuts en furent modestes, car les membres, la plupart dépourvus d’instruction classique, ne cherchaient qu’à s’instruire réciproquement en se faisant part de leurs travaux et de leurs essais. Peu à peu cependant la société s’attacha des savans, créa une bibliothèque, multiplia les expériences, réunit des collections, publia un bulletin, encouragea les inventions, s’occupa d’améliorer le sort des ouvriers et acquit rapidement une grande autorité. Chaque sociétaire paie 50 francs par an. À ces cotisations s’ajoutent des souscriptions fréquentes, des dons et des legs s’élevant à plusieurs centaines de mille francs. La société comptait, en 1876,498 membres ordinaires et 126 correspondans ; ses recettes courantes étaient de 38,600 francs et ses dépenses de 29,258 francs. L’esprit le plus large anime tous les membres qui, malgré des divergences d’opinion, malgré les désastres de la patrie, ont toujours fait passer l’intérêt de la science et de l’institution avant leurs préférences personnelles. Énumérer les principales questions que cette société a mises à l’étude, c’est passer en revue l’industrie tout entière ; c’est ainsi qu’elle s’est occupée des matières colorantes pour l’impression des étoffes ; des moyens de diminuer le prix de la force motrice, de perfectionner les machines à vapeur et de prévenir les accidens ; de la combustion des houilles, des découvertes de M. Hirn sur l’équivalent mécanique de la chaleur, des peigneuses pour la filature du coton et de la laine, de l’invention d’une locomotive de montagne, de la création d’écoles spéciales pour la filature et le tissage, pour la chimie et le dessin ; du perfectionnement de l’industrie du papier, de la législation des brevets d’invention, de la protection des marques de fabrique, de la limitation du travail des enfans dans les manufactures, de la réforme des logemens d’ouvriers, des institutions de secours et de prévoyance, de la statistique générale du Haut-Rhin, etc.

Une des plus graves préoccupations de la Société industrielle a été la fondation d’écoles techniques de dessin, de filature, de tissage, de chimie et de commerce, d’une école professionnelle et d’une école supérieure des sciences appliquées. Toutes ces institutions sont destinées à former des sujets connaissant non-seulement leur métier, mais aussi les notions théoriques sur lesquelles reposent les opérations qu’ils seront appelés à exécuter. Précisément parce qu’ils sont très pratiques, les fabricans de Mulhouse pensent que, pour savoir ce qu’on dit quand on parle et ce qu’on fait quand on agit, la théorie est indispensable. L’école de dessin a été fondée en 1828, elle compte environ 300 élèves, dont beaucoup deviendront de véritables artistes, et a puissamment contribué à développer le bon goût et la perfection des dessins qui caractérisent la fabrication de