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Mulhouse. Un musée industriel y est annexé ; il renferme la collection des échantillons et des modèles de tous les articles exécutés par les fabriques d’impression, et dans lequel les dessinateurs peuvent aller puiser des inspirations pour leurs compositions nouvelles. Au moyen de souscriptions, le comité des beaux-arts achète aux diverses expositions des œuvres dont il enrichit le musée de Mulhouse, qui devient ainsi un centre artistique où le goût s’épure et se perfectionne.

L’école de chimie ne rend pas moins de services ; d’abord simple laboratoire de l’école professionnelle, elle est devenue en 1867 un établissement indépendant dont l’installation et le matériel ne laissent rien à désirer. Les élèves n’y sont admis qu’à dix-huit ans, après un examen constatant qu’ils ont déjà des notions de chimie assez étendues ; après deux ans d’études dans lesquels on leur enseigne l’application de la chimie aux arts industriels, ils deviennent aptes à diriger les opérations de l’impression des étoffes, de la fabrication des produits chimiques, du papier, de la verrerie, etc., Les écoles de tissage et de filature, fondées en 1861 et 1865, rendent des services du même genre en mettant les jeunes gens au courant de tous les procédés de la fabrication des tissus.

Peu de temps après l’ouverture de ces établissemens, en 1866, deux membres de la Société industrielle, MM. Siegfried frères, consacrèrent une somme de 100,000 francs à la fondation d’une école de commerce, la seule qui manquât encore à l’ensemble de l’enseignement technique de Mulhouse. Cette école était en pleine prospérité quand éclata la guerre néfaste dont l’annexion de l’Alsace à l’Allemagne fut la douloureuse conséquence. Les professeurs, expulsés par les Prussiens, furent appelés à Lyon, où un groupe de négocians venait de fonder une école sur le modèle de celle de Mulhouse, pendant que les fondateurs de celle-ci, MM. Siegfried, renouvelaient au Havre, où ils avaient émigré, le don généreux qui permit à cette ville d’avoir aussi une institution du même genre.

Par leur simple initiative, sans faire appel ni à l’autorité ni à la caisse du gouvernement, les fabricans de Mulhouse ont donc réussi à créer un foyer d’instruction professionnelle qui a répandu ses rayons bienfaisans sur l’Alsace entière et assuré, dans la mesure du possible, la prospérité de ce beau territoire. Cette initiative, inspirée par l’amour du bien, s’est manifestée avec une puissance et des résultats plus remarquables encore dans l’étude des questions qui touchent au bien-être de la classe laborieuse.

La population ouvrière de l’Alsace, d’après un recensement fait en 1875, se monte, en dehors de l’agriculture, à 177,320 individus des deux sexes, dont 90,683 fréquentent des ateliers occupant plus de