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sud-ouest, et les traités de météorologie ne donnent à ce sujet que des explications embarrassées et confuses. Une complication nouvelle naît du renversement périodique des vents réguliers qui constitue les moussons de l’Océan indien et de quelques autres régions du globe.

Ne serait-il pas possible de mieux coordonner tant de faits épars et d’en tirer une théorie générale des grands mouvemens de l’atmosphère qui, du même coup, fît entrevoir l’explication de ces accidens que nous appelons tempêtes ? C’est le problème qu’a tenté de résoudre M. de Tastes dans une remarquable étude sur la Théorie de la circulation atmosphérique, que l’on trouve dans le livre des Annales du Bureau central météorologique (année 1879). Pour M. de Tastes, les mouvemens verticaux qui ont lieu dans la mince enveloppe aérienne du globe peuvent être négligés, et il suffit de considérer les mouvemens tangentiels à la surface, qui n’ont d’autre cause que l’inégale densité de l’air froid du pôle, et de l’air chaud des tropiques, d’où résulte une tendance au mélange. Si la surface terrestre était homogène, il n’y aurait aucune raison pour que les courans par. lesquels s’accomplirait le mélange s’établissent suivant des méridiens déterminés : ils s’entre-croiseraient dans une extrême confusion, comme nous voyons les filets ascendans et les filets descendans se croiser dans un liquide chauffé par le bas. Mais la nature particulière des surfaces que ces courans effleurent détermine des lignes d’élection que les courans directs et les courans de retour sont forcés de suivre, et il se forme ainsi un certain nombre de circuits fermés, analogues aux courans marins, avec lesquels ils coïncident en partie. C’est la distribution des terres et des mers qui règle cette circulation complexe des eaux et des vents.

Quelle que soit la cause qui, à l’origine, ait fait naître le gulf-stream, ce fleuve aux rives liquides existe, et la configuration même du bassin de l’Atlantique lui trace le lit où il coule aujourd’hui. L’air qui repose sur ces eaux tièdes, échauffé par leur contact, forme une longue traînée de gaz chauds et dilatés qui, pour ainsi dire, sert d’amorce au mouvement de translation de l’air dilaté des tropiques vers les régions polaires, et constitue un véritable gulf-stream aérien. « Or, celui-ci n’étant pas arrêté, dit M. de Tastes, comme son congénère liquide, par la barrière des continens, après avoir abordé nos côtes occidentales, continue sa marche vers l’est à travers le nord de l’Europe, où il condense sous forme de pluie ou de neige les vapeurs dont il est saturé et qui sont comme son certificat d’origine, entretient l’abondance des eaux dans les innombrables lacs de la Suède, de la Finlande et de la Russie septentrionale, et amorce à son tour les courans de retour des régions polaires vers l’équateur ; il revient vers le sud, à travers l’Europe orientale, sous la forme d’un vent sec et froid qui imprime à ces régions leurs caractères