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météorologiques dominans. » À mesure qu’il se rapproche de l’équateur, il se réchauffe, et devenu vent de nord-est dans l’Afrique tropicale, il contribue à la stérilité des déserts qu’il traverse. Il reparaît enfin sur la côte occidentale de l’Afrique et complète ainsi un vaste circuit, délimitant une aire centrale où règne un calme relatif et qui n’est pas sans analogie avec la « mer de Sargasses » de l’Atlantique. Cette conception d’un fleuve aérien presque circulaire qui suit en partie le cours du gulf-stream, s’accorde assez bien avec ce que nous savons du régime des vents dans notre hémisphère. Elle semble également propre à expliquer toutes les allures des bourrasques qui nous atteignent. En effet, sur la rive gauche de ce fleuve, qui est la rive concave, où le courant a le plus de vitesse, il doit se produire des tourbillons analogues à ceux que nous observons dans les eaux courantes quand la nature des terrains les force à décrire une courbe. Dans ces tourbillons, l’eau tourne avec rapidité comme tournerait une roue horizontale assujettie à rouler sur la rive dans la direction du courant ; pour la rive gauche de notre fleuve aérien, le sens de cette rotation serait inverse de celui des aiguilles d’une montre, et c’est là précisément le sens de la rotation des tempêtes qui traversent l’Atlantique ou notre continent en suivant des routes dirigées d’un point compris entre le sud-ouest et le nord-ouest vers un point compris entre le nord-est et le sud-est. Le fleuve circulaire de M. de Tastes, cet anneau formé par l’alizé et le contre-alizé de l’hémisphère nord, peut donc aussi rendre compte de l’origine des bourrasques et des ouragans. Toutes les vicissitudes de nos climats dépendent des oscillations qui déplacent le lit de ce fleuve, et c’est par l’observation attentive de ces fluctuations que l’on parviendra sans doute à prévoir le caractère des saisons.

Le bassin du Pacifique nord renferme un circuit analogue, mais plus vaste et moins bien dessiné que celui de l’Atlantique. Amorcé par le kuro-siwo (courant noir) des côtes du Japon, le fleuve aérien suit la courbe formée par les Kouriles, les Aléoutiennes et la presqu’île d’Aliaska, côtoie l’Orégon et la Californie, alimente de ses vapeurs condensées les grands lacs de l’Amérique du Nord, redescend à travers la vallée du Mississipi vers le golfe du Mexique, où il produit ces norte si connus des marins, et reparaissant sur le Pacifique sous le nom d’alizé, va rejoindre le courant équatorial qui complète le circuit. En suivant ce tracé sur une carte, on remarquera que la branche descendante du circuit du Pacifique est assez voisine de la branche montante du circuit atlantique ; elles sont exposées, dans leurs fluctuations, à se mettre en contact et à réaliser les circonstances favorables à la formation des tornades et des cyclones, si fréquens dans ces parages. Là évidemment est la source des tempêtes qui désolent les régions tempérées.