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sous-produits. Comment la ville de Paris pourrait-elle débattre des marchés d’un million de tonnes de houilles et se faire ensuite marchande de coke à l’hectolitre ? Je ne me représente pas M. Camus, fonctionnaire de la ville, rendant ses comptes au conseil municipal, publiant ses marchés de houille, expliquant la nécessité de maintenir élevé le cours du coke lorsque les magasins en sont encombrés, enfin donnant des détails sur les fabrications accessoires du brai, des briquettes, de l’anthracène, de l’aniline. Un commerce si vaste et si compliqué ne peut pas se conduire administrativement.

La concession d’un monopole aux fabricans de gaz paraît donc nécessaire, mais elle ne doit pas s’accorder sans garantie. L’industriel qui jouit d’un monopole doit s’attendre à voir ses tarifs arrêtés et révisés, ses comptes vérifiés par l’autorité qui le lui assure. Le maximum ne peut être imposé que par mesure révolutionnaire au négociant libre, que la concurrence de ses voisins oblige à limiter ses bénéfices. Mais, quand il y a monopole, le maximum est parfaitement légitime. Le traité de 1855 fixe à 30 centimes le prix de vente ; c’était alors un prix assez modéré : on avait payé 35 et 40 centimes aux trois ou quatre compagnies qui exploitaient auparavant la capitale. Les rédacteurs du traité firent plus : ils comprirent que l’industrie du gaz était alors presque à ses débuts et qu’on pouvait s’attendre à des progrès : ils voulurent que la population pût en profiter. Et ils stipulèrent que, si le progrès de la fabrication faisait diminuer le prix de revient du gaz, l’administration aurait à décider dans quelle proportion cette diminution devait profiter au public. Une commission de savans désignés par M. le ministre de l’intérieur devait donner son avis, soit pour introduire des perfectionnemens, soit pour déterminer les avantages qui pouvaient résulter de perfectionnemens déjà adoptés. Ces savans seraient ainsi, ou des initiateurs ou des experts. Tel est le sens de l’article 11 du traité de 1855. En 1870, certaines modifications furent adoptées. L’article 11, intégralement recopié, devint l’article 48.

En 1879, le conseil municipal, sur la proposition de M. Ernest Hamel, demanda pour la première fois la réunion de la commission scientifique. Peu de temps après, une commission municipale était nommée pour étudier un arrangement offert par la Compagnie du gaz. Le conseil, on le voit, songeait à la fois à l’application stricte de son droit et à une transaction.

La commission scientifique fut choisie par M. le ministre de l’intérieur Constans. Des chimistes distingués en firent partie ; c’étaient M. Dehray, M. Aimé Girard, directeur du laboratoire de la préfecture de police, M. Troost, aujourd’hui administrateur de la Compagnie du gaz, et quelques autres. M. Berthelot donna sa démission après la première séance. Cette commission formula des