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Ce n’est que rarement par le Haut-Sénégal que les caravanes du Haut-Niger vont vendre la poudre d’or et les cuirs ; c’est surtout par la route du Fouta, qui passe à Fodé-Hadji, ou bien par le Soulimania, qu’elles se dirigent vers les rivières du sud pour échanger leurs produits contre les marchandises d’Europe.


II.

Les Pouls, Foulbès, Foulans, Fellatas, Fellahs ou Peulhs forment une race profondément distincte de celle des noirs du Soudan. Ils disent eux-mêmes qu’ils sont de race blanche, et qu’ils viennent d’un pays lointain situé du côté de La Mecque. La légende raconte que les pères de leur nation étaient aux côtés des lieutenans du Prophète, et ont combattu pour le triomphe de l’islam à son début. C’étaient Modi Ousman et Modi Aliou, guerriers énergiques, marabouts fervens, qui furent chargés de venir convertir les peuplades sauvages du Niger. Le prophète Mohammed leur accorda comme récompense que l’heure des punitions et des récompenses sonnerait deux cents ans plus tard pour les hommes que celle qu’il avait d’abord fixée.

Les Pouls qui habitent le Fouta-Djalon sont originaires du Massina, ainsi que l’a affirmé l’almamy Ibrahima Sory, petit-fils d’Almamy Sory le Grand, le chef illustre qui a fondé l’unité nationale. Ce sont les Sidiankés ; mais d’autres tribus ne tardèrent pas à venir les rejoindre. Pouls du Fouta-Toro, Toucouleurs, descendirent sur la Gambie et de là gagnèrent les hauts plateaux du Timbé et du Labé pour se joindre à leurs frères. Une chronique écrite en arabe et que m’a donnée Alfa Suleyman, chef de Cousotomi, en témoigne.

Hartmann dit que les Pouls paraissent issus du Fouta-Toro, à l’ouest de l’Afrique. À la fin du siècle dernier, ils conquirent le Fouta-Djalon, pays des Mandingues, fondèrent en 1802 l’empire de Sokoto sous leur prince Da-n-Fodio, musulman inspiré, et s’étendirent de plus en plus à l’intérieur. Ils sont grands et minces ; leurs cheveux sont peu crépus ; leur barbe, rouge brun ou plus foncée, est rase ; leur langue rappelle celle des Berbères.

S’il faut en croire la chronique d’Ahmed, les premiers Fellatas ou Foulbés, quittant le Niger, où ils vivaient de leurs troupeaux, seraient venus s’établir au XVIe siècle au Bornou, sous le règne d’Abdallah. « Les Pouls, dit le général Faidherbe, qui deviennent les maîtres du Soudan depuis leur conversion générale à l’islamisme, sont peut-être anciennement venus de l’Orient, amenant avec eux le bœuf à bosse (zébu), qui est le même que celui de la Haute-Egypte et de la côte orientale d’Afrique. » Müller rapproche, comme race et comme langue, les Pouls et les Nubiens.