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chrétiennes sont en droit de se réclamer de l’église des catacombes ; car toutes y ont leur berceau, les divergences n’étant venues que dans la suite des temps…

« La religion populaire des églises naissantes était parfaitement concrète : la poésie naïve des catacombes, ces images artistiques, ces paraboles enluminées, ces formules touchantes cachaient une foi robuste en des faits surnaturels…

« Parmi les croyances générales auxquelles s’attachaient les chrétiens des trois premiers siècles, croyances chrétiennes et morales plutôt que didactiques, nous devons mettre au premier rang leur foi robuste en la survivance de l’homme, en l’immortalité. Cette croyance consolante qui rattachait pour toujours l’homme à Dieu, à Christ, parlait de vie au-delà de la tombe. La sérénité joyeuse que nous avons eu tant de fois l’occasion de mentionner suppose des certitudes que notre siècle pourrait envier à ces temps de ferveur première. Cette « vive représentation des choses qu’on espère » était d’autant plus remarquable qu’on sortait ou du judaïsme, auquel une critique exagérée refuse la notion claire du monde futur, ou du paganisme, qui, par l’organe de ses philosophes les plus autorisés, énonçait tout au plus des probabilités en faveur de la vie à venir. Sous ce rapport, la société religieuse naissante tranche sur tout le monde antique. C’est plus qu’une doctrine, c’est une vie. Le précepte était dépassé par la possession. L’invisible était démontré, hors de question. On aspirait aux choses qui ne se voient point : le voile de la tombe était soulevé[1]. »

Voilà qui est juste et bien dit. Mais s’il n’y a pas de théologie dans les catacombes, pourquoi M. Roller a-t-il, à propos des catacombes, écrit un livre où la théologie tient tant de place ? Et si c’est justement pour le démontrer, il s’est mis en bien grands frais d’érudition pour un résultat un peu mince, pour une vérité dont facilement conviennent tous ceux qui ne font pas profession officielle de théologie.


B. AUBÉ.

  1. Tome II, pages 376, 377.