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s’affaiblissant, tandis qu’en face de lui l’influence d’un rival grandissait tous les jours. Oulid-bou-Mezrag, le fils aîné de l’ancien bey de Titteri, avait obtenu du général Clauzel l’autorisation de résider à Blida, puis même, comme’il paraissait inoffensif, de retourner à Médéa. Là, sans bruit d’abord, il avait renoué avec les anciens amis de son.père ; peu à peu, le nombre de ses partisans s’était accru ; enfin, un beau jour, levant le masque, il était sorti de la ville avec deux cent cinquante Turcs et Coulouglis et avait planté ses tentes chez les Righa, la plus puissante des tribus qui refusaient d’obéir à Ben-Omar. Avec le concours de ces auxiliaires et d’autres encore, il s’était emparé de la Ferme du bey, d’où il empêchait les approvisionnemens d’arriver à la ville. Ben-Omar, dans l’épouvante, écrivit au général Berthezène que si l’on ne venait pas à son aide, il était perdu. Le commandant en chef décida d’aller le secourir.

Un ordre du 23 juin constitua une division de deux brigades : la première, sous les ordres du maréchal-de-camp Buchet, comprenait deux bataillons du 28e, un bataillon d’élite, formé de dix compagnies de grenadiers et de voltigeurs empruntées au 28e et au 15e, un bataillon mixte formé, sous les ordres du commandant Duvivier, de quatre des compagnies déjà organisées du 67e et de deux cents zouaves, deux escadrons de chasseurs de France et cinquante chasseurs algériens ; la seconde brigade, commandée par le maréchal-de-camp de Feuchères, était formée de quatre bataillons, deux du 20e, deux du 30e. L’artillerie emmenait quatre pièces de campagne et deux obusiers de montagne ; le génie était représenté par une section de sapeurs. La force de la division était de quatre mille cinq cents hommes. Dans les sacs et sur les fourgons de l’intendance, il y avait pour huit jours de vivres ; d’après l’expérience acquise, c’était peu ; ce qui était plus insuffisant encore, c’étaient les munitions de guerre. Dans la première expédition de Médéa, le général Clauzel, avec cent cinquante cartouches par fusil, s’était trouvé à court : pour celle-ci, le soldat n’en avait que trente dans sa giberne ; quarante-cinq mille, soit dix par homme, étaient en réserve dans les caissons de l’artillerie.

La marche, commencée le 25 juin, se poursuivit sans incident pendant les deux premiers jours. Haouch-Mouzuïa, où la colonne bivouaqua le 26, avait été dévasté par les Kabyles ; il ne restait debout que l’enceinte et quelques pans de murs à l’intérieur. Néanmoins, grâce à l’activité du génie, l’ambulance put s’installer à couvert et la défense fut assurée par une banquette de tir appuyée à la muraille. Le commandant en chef y laissa, sous la garde d’un bataillon du 30e, tous les bagages, toutes les voitures d’artillerie, sauf les obusiers de montagne, et, ce qui était plus grave, la réserve