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REVUE MUSICALE

LE CINQUANTENAIRE DES HUGUENOTS A L’OPÉRA.

Nous reprendrions volontiers, au début de cette chronique, une phrase de M. Blaze de Bury : « Assurément, écrivait-il naguère, ni Robert le Diable ni les Huguenots n’ont quitté le répertoire de l’Opéra; mais la manière dont ils y figurent désormais ne saurait convenir à de tels chefs-d’œuvre, pas plus qu’à la dignité du théâtre sur lequel ils se produisent... j’assistais dernièrement à une représentation des Huguenots; j’en suis sorti navré, au point de me demander si c’était aussi beau que je me l’imaginais[1]. » Nous avons eu la même impression en écoutant les Huguenots, que l’Opéra donnait récemment pour le cinquantenaire de leur première représentation, et pour le troisième début d’un jeune ténor qui fait en ce moment beaucoup trop de bruit à l’Académie de musique. Il est triste que les interprètes d’une œuvre, ceux qui devraient l’éclairer, n’arrivent qu’à l’obscurcir, et c’est grand’pitié quand les défenseurs naturels des causes sacrées semblent s’en faire les pires ennemis. Tout conspire à l’Opéra contre ces pauvres Huguenots, et, pour reconnaître la sublime partition, il faut la relire dans la solitude. Alors seulement les héroïques figures de Meyerbeer se dégagent, le chef-d’œuvre de nouveau resplendit, et notre vieil enthousiasme, réveillé, venge le maître et nous console nous-méme d’une indifférence passagère.

« Qui doit-on accuser? » dira-t-on avec Saint-Bris. Ferons-nous le

  1. Meyerbeer et son Temps, par M. Blaze de Bury.