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qui appartiennent à des races très différentes : Arabes, Susiens, Loris, Bakhtyaris, Farsis. Ces tribus ne se mélangent pas, alors même qu’elles mènent une vie toute pareille. Chacune d’elles peut être ou nomade ou sédentaire ; les conditions de son existence sont déterminées par la nature du sol où elle habite ; car si, dans tous les lieux du monde, la terre exerce une action sur les hommes qu’elle porte, il n’est pas une contrée où cette influence soit plus immédiate et plus sensible qu’en Perse.

Partis de Suze le 17 mai, nous nous sommes dirigés sur Dizfoul et Chouster. De là nous sommes entrés dans la montagne, montant toujours de plateau en plateau jusqu’à Malamir, où nous avons séjourné quatre jours. Nous avons redescendu ces gradins par une autre voie et nous avons atteint Ram-Hormuz, Bebahan, puis Bender-Dilem, sur les bords du Golfe-Persique. Après avoir longé la côte jusqu’à Bender-Rig, nous avons retrouvé à Daliki la route de Bender-Bouchir à Chiraz, que les caravanes parcourent dans toute la belle saison. Il ne nous restait plus désormais qu’à suivre les lacets que les pieds des mulets laissent aux flancs de la montagne ; nous n’avions plus la préoccupation de rechercher dans, les hautes herbes séchées une piste à peine tracée, comme nous étions obligés de le faire depuis notre départ de Chouster. La partie la plus difficile de notre voyage était alors terminée.


I.

Le nom de Perse, embrassant tous les pays compris entre le Golfe-Persique, la Turquie d’Asie, la Russie, l’Afghanistan et le Béloutchistan, n’est qu’une désignation politique; c’est le territoire, dont les habitans obéissent, ou, pour mieux dire, paient l’impôt au chah de Téhéran. Au point de vue de la géographie physique, il faudrait y distinguer quatre zones. La première est formée par les provinces montagneuses et forestières du Mazenderan et du Ghilan, qui prolongent la région du Caucase. Les trois autres zones à distinguer sont : 1° le plateau de l’Iran; 2° les gradins successifs qui conduisent des hauts plateaux à la plaine de l’Arabistan ; 3° la plaine de l’Arabistan, qui s’étend du pied des montagnes aux bords du Golfe-Persique.

De ces trois parties, la plus étendue, la plus peuplée, la plus riche en villes et en villages, quoique la moins favorisée par la nature, est celle des hauts plateaux. M. Dieulafoy a déjà appelé l’attention sur ce fait, que cette partie de la Perse ne possède point d’eau de surface. A part le Zende-Roud, qui traverse Ispahan et qui, d’ailleurs, se perd dans le sol, il serait impossible d’y trouver un fleuve de quelque importance. Les seuls arbres que l’on y voie