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gouvernemens. C’est ce qui fait que la solution n’est plus aisée, si elle l’a jamais été, que le point noir reste toujours à l’horizon des Balkans. La question de Bulgarie, toute petite qu’elle soit ou qu’elle paraisse, c’est la question des rapports entre des puissances qui se rapprocheront peut-être demain, qui pour le moment ne semblent pas plus d’accord à Sofia qu’ailleurs.

A vrai dire, il n’y a plus de petites questions dans l’état présent du monde. Les troubles politiques, diplomatiques ou industriels des petits pays intéressent tous les pays, parce que tout se tient de plus en plus dans la vie moderne, et les agitations auxquelles la Belgique est en ce moment livrée ne sont que la manifestation d’un malaise économique ou social dont souffrent la plupart des nations de l’Europe. Ces agitations ne sont que la recrudescence ou la suite de la crise qui éprouvait si profondément la Belgique il y a un an à pareille époque, qui avait pris un instant tous les caractères d’une insurrection servile, d’une guerre incendiaire et dévastatrice. Les grèves de l’art dernier viennent de recommencer autour de Charleroi, du côté de Liège, de Mons, dans le Hainaut, dans le Borinage, partout où il y a des agglomérations d’ouvriers. Presque partout, dans les charbonnages, dans les usines et les manufactures, le travail est suspendu. Les ouvriers quittent leurs ateliers par bandes et se répandent dans le pays ; le mouvement s’est propagé avec une singulière rapidité. Les grèves d’aujourd’hui n’ont pas été accompagnées jusqu’ici, comme il y a un an, de scènes d’incendie et de destruction, d’assauts furieux livrés à des usines, à des maisons des chefs d’industrie. Il est malheureusement assez clair, néanmoins, que la bonne volonté ne manque pas aux agitateurs, et que la dynamite a son rôle dans l’exécution de leurs plans. S’ils n’ont pas fait plus de victimes, ce n’est pas leur faute, ils y ont mis tout leur zèle. Bref, sans avoir atteint du premier coup à un degré aussi marqué de violence, le mouvement gréviste qui vient de se déclarer ne ressemble pas moins à celui de l’art dernier et prend à peu près les mêmes caractères ; il avait commencé, il y a un an, parmi les verriers ; il s’est déclaré d’abord aujourd’hui parmi les mineurs pour s’étendre bientôt à une foule d’autres industries.

Quelle a été la cause apparente ou immédiate de ces grèves nouvelles, qui sont une dangereuse épreuve et pour le travail et pour la paix publique ? Assurément toutes ces populations du Borinage et des centres miniers de la Belgique ont une vie rude et pénible. Qu’elles songent ou qu’on songe pour elles à améliorer leur sort, à alléger leur fardeau, à adoucir une situation où le travail ne suffit pas toujours à les sauver de la misère, rien ne serait plus humain et plus prévoyant. Est-ce pour obtenir quelques-unes de ces améliorations désirables, pratiques, possibles, ou pour des griefs précis, positifs et récens, que les grèves ont commencé ? S’agit-il encore une fois de l’éternelle