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mémoire l’histoire sacrée et les divers mérites des élus de Dieu, découvre que Pépin est un nouveau Moïse, car Moïse a reçu de Dieu l’ordre d’arracher le peuple d’Israël à l’oppression, et Dieu a inspiré à Pépin la libération de la sainte église catholique, apostolique et romaine. Partant de là, il fait un parallèle en trois points entre les deux personnages. En toute occasion éclate le zèle de son affection. Le roi a envoyé une table, que ses missi ont présentée « devant le corps du portier des cieux. » Paul la fait porter à la place qui lui est destinée dans l’église, en procession, avec des hymnes, des cantiques et des litanies. Il la sanctifie par l’onction du saint chrême; il « célèbre dessus le saint sacrifice de la messe, pour l’éternelle rémunération » de l’âme royale. Il défend, sous peine d’anathème, qu’elle soit jamais enlevée au prince des apôtres. Elle restera là, « brillante, jusqu’à la fin des temps, et le donateur recevra sa récompense dans les royaumes célestes. »... Un fils est né au roi. « Dieu, lui écrit Paul, a fait sortir de vos entrailles un nouveau roi pour l’exaltation de la sainte église. » Il sollicite « la faveur » d’être le parrain de l’enfant. Déjà, il se considérait comme le parrain de Gisèle, fille de Pépin, parce que le roi lui avait envoyé le linge où l’enfant avait été enveloppée au sortir du baptistère. Il avait reçu ce « précieux » cadeau en présence du peuple. Il l’avait déposé sur le tombeau de sainte Pétronille, fille de saint Pierre, et il y avait célébré la messe. Dès lors, il nomme Gisèle sa filleule, Pépin, son compère, et la reine Bertrade, sa commère. Il est « le père spirituel des enfans dont ils sont les parens charnels. » Il a toujours un mot pour chacune des personnes de la famille. Il écrit souvent et prie qu’on lui écrive. Il est si heureux de recevoir des lettres, qu’il qualifie de nectarées et de florigères! Quand Pépin est engagé au plus fort de la guerre d’Aquitaine, Paul lui exprime le très grand désir d’avoir des nouvelles, mais il ne reçoit pas de réponse. Il se lamente : « Mon âme est violemment consternée. » Heureusement, il finit par apprendre que tout va bien, mais c’est par voie indirecte. Il supplie « sa sublime excellence de daigner lui faire la joie de l’assurer de sa bonne santé, et de lui dire comment vont sa commère et les enfans. » Sa joie éclate quand enfin Pépin a écrit, et demandé à son tour comment se portent la sainte église et le pape et le peuple à lui confié.

Ainsi vécut Paul Ier , caressant, priant, attirant de plus en plus le roi franc dans la douce intimité de l’église romaine. Il avait eu raison de recommander sans cesse le siège apostolique à la protection de Pépin. De singuliers événemens se passèrent en l’année 757, pendant qu’il agonisait, frappé d’un mal subit, dans l’église