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le diocèse de Grenoble, il n’en souffre que huit en sept ans[1] : de cette façon, non-seulement il garde ses conscrits, mais encore, par le manque de jeunes prêtres, il force les évêques à placer d’anciens prêtres, même des constitutionnels, presque tous pensionnaires du trésor, ce qui décharge le trésor d’une pension ou la commune d’une subvention[2]. — Ainsi, dans la reconstruction de la fortune ecclésiastique, l’État s’épargne, et sa part contributive demeure exiguë ; il ne fournit guère que le plan, quelques grosses pierres d’attente et d’amorce, la licence ou l’injonction de bâtir ; le reste regarde les communes et les particuliers : à elles et à eux de s’évertuer, de continuer et d’achever, par ordre ou spontanément, sous sa direction permanente.


VIII.

Tel est son procédé constant, et il l’applique à la reconstruction des deux autres fortunes collectives. — Pour ce qui concerne les établissemens de bienfaisance, sous le Directoire, les hospices et hôpitaux avaient été réintégrés dans leurs biens non vendus, et, en remplacement de leurs biens vendus, on leur avait promis des biens nationaux de produit égal[3]. Mais l’opération était compliquée ; dans le gâchis universel, elle avait trahie; pour l’effectuer, le premier consul la réduit et la simplifie. Du domaine national, il détache tout de suite une portion, plusieurs morceaux distincts dans chaque district ou département, en tout 4 millions de revenu annuel en immeubles productifs[4], et il les distribue aux hospices au prorata de leurs pertes ; de plus, il leur attribue toutes les

  1. Archives de Grenoble. (Documens communiqués par Mme de Franclieu.) Lettre de l’évêque, Mgr Claude Simon, 18 avril 1809, au ministre des cultes. « Depuis sept ans que je suis évêque de Grenoble, je n’ai encore ordonné que 8 prêtres; pendant cet intervalle, j’en ai perdu au moins 150. Les survivans me menacent d’une lacune plus rapide : ils sont ou infirmes, ou courbés sous le poids des années, ou surchargés de fatigues. Il est donc urgent que je sois autorisé à conférer les saints ordres à ceux qui ont l’âge et l’instruction nécessaires. Cependant vous vous êtes borné à demander l’autorisation pour les huit premiers de la susdite liste, dont le plus jeune est âgé de vingt-quatre ans... Je prie Votre Excellence de présenter à l’autorisation de Sa Majesté Impériale les autres sujets de cette liste. » — Id., 6 octobre 1811. « Je n’ai qu’un diacre et un sous-diacre, tandis que je perds chaque mois trois ou quatre prêtres. »
  2. Articles organiques, 68, 69. « Les pensions dont les curés jouissent en vertu des lois de l’assemblée constituante seront précomptées sur leur traitement. Les vicaires et les desservans seront choisis parmi les ecclésiastiques pensionnés en exécution des lois de l’assemblée constituante. Le montant de ces pensions et le produit des oblations formeront leur traitement. »
  3. Lois du 16 vendémiaire an V et du 20 ventôse an V.
  4. Arrêté du 6 novembre 1800.