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LA
PHILOSOPHIE DE LAMENNAIS

III.[1]
LAMENNAIS MÉTAPHYSICIEN ET ESTHÉTICIEN.

C’est un trait assez remarquable de la philosophie de notre siècle qu’un grand nombre de philosophes, et des premiers, ont eu deux philosophies, plus ou moins différentes l’une de l’autre. Ce trait ne se rencontre pas souvent dans le passé. Ni Descartes, ni Spinoza, ni Malebranche n’ont eu deux doctrines successives. Leibniz a sans doute constamment modifié sa philosophie, mais toujours dans le même sens. Le XVIIIe siècle présente le même spectacle. Ni Condillac, ni Diderot, ni Helvétius n’ont changé de philosophie. Au XIXe siècle, au contraire, le fait est très fréquent. Fichte, le philosophe du moi et de la volonté, a fini par une philosophie mystique, d’un caractère alexandrin. Maine de Biran a traversé les mêmes phases ; et il a passé, comme Fichte, de la philosophie de la volonté au mysticisme chrétien. Schelling a commencé par la philosophie de la nature et a fini aussi par une philosophie néo-chrétienne. V. Cousin a passé du panthéisme allemand au théisme spiritualiste et cartésien. Aug. Comte a eu également ses deux périodes : la période objective

  1. Voyez la Revue du 1er  février et du 1er  mars.