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aujourd’hui. Le droit de suffrage politique, limité à 7,300 personnes en 1838, appartenait à 63,718 citoyens en 1884 ; le nombre des électeurs municipaux est passé de 5,023 en 1838 à 74,167 en 1884.

Trois des grandes entreprises municipales nous serviront d’exemples pour montrer dans quel esprit les élus de cette armée électorale ont administré les affaires de la cité.

De 1851 à 1873, de grands progrès furent faits dans les diverses branches de l’administration municipale, mais l’élection de M. J. Chamberlain à la plus haute magistrature municipale est comme le signal d’un essor plus vigoureux encore. La ville était d’un bout à l’autre un amas informe de bâtisses sans caractère, un fouillis de ruelles : le nouveau maire conçut le plan d’exproprier l’énorme pâté de huttes malsaines et misérables qui déshonoraient et empestaient le centre de la cité, de tracer de grandes voies de communication, d’aérer, d’assainir ; ainsi fut fait, et Corporation street, l’artère principale, qui perça de part en part ce chaos obscur, ferait honneur à n’importe quelle capitale. Il fallait plus : M. J. Chamberlain rêvait de fournir à ses concitoyens deux choses de première nécessité, l’eau et la lumière, à meilleur compte, tout en faisant les affaires de la ville. Il obtint du parlement le vote d’un acte qui autorisa la ville à exproprier les compagnies fermières des entreprises du gaz et de l’eau. La commune devint chef d’industrie et les résultats furent surprenans. Le gaz, qui était vendu 3 shillings les 1,000 pieds cubes en 1875, n’est plus vendu en 1889 que 2 shillings, et cependant le bénéfice net annuel passa de 25,339 livres en 1875 à 70,337 en 1889. — Pour l’eau, les chiffres ne sont pas moins éloquens : en 1876, le département municipal des eaux percevait de ses cliens la somme de 93,527 livres, il en dépensait 38,138, plus l’annuité versée à la compagnie expropriée, et réalisait un bénéfice de 5,456 livres. En 1881, 1883, 1884, le prix total de l’eau vendue, grâce à trois réductions successives du tarif, est diminué de 5,000 livres dans la première année, de 17,391 dans la deuxième et de 2,914 dans la troisième : les bénéfices, qui étaient en 1881 de 12,046 livres, disparaissent en 1883 ; en 1884, il y a une perte de 8,940 livres qui va diminuant jusqu’en 1887, et le bénéfice reparaît en 1888 pour s’élever en 1889 à 2,878 livres. Le comité de l’eau médite déjà une nouvelle réduction du prix de vente.

Il est un point capital à noter : si, contrairement aux principes de l’école du « laisser-faire, » la ville de Birmingham a pris en mains le monopole de l’eau et du gaz, ce n’a pas été simplement pour le plaisir d’augmenter les attributions de la municipalité, ni pour en venir à vendre le gaz ou l’eau à perte. Les deux entreprises