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aspirant à Saint-Cyr se présenter quatre lois au concours, un candidat à l’école des Arts et Métiers, devant avoir plus de quinze et moins de dix-sept ans, doit forcément renoncer à la partie après un second échec.

On exige aussi beaucoup des très jeunes gens qui affrontent les épreuves. Il est oiseux de faire remarquer que le programme roule presque uniquement sur les mathématiques, et que le latin en est exclu comme les langues vivantes. En fait de lettres, on se contente de quelques notions d’histoire et de géographie, telles qu’on les enseigne dans les cours primaires supérieurs, d’une écriture et d’une orthographe correctes. Mais, en revanche, autant d’arithmétique et de géométrie que pour le baccalauréat ès-sciences avec une bonne dose d’algèbre (les symboles et le calcul algébrique avec les équations du premier degré) : l’épreuve est rude à subir pour une intelligence de seize ans. Nous avons parcouru le recueil des sujets de composition écrite ; plus d’un élève d’élémentaires n’aurait pas eu trop de toute son application pour les résoudre. Enfin, si la théorie a une large part, la pratique n’est pas oubliée non plus. Parmi les épreuves figurent l’exécution d’une épure de géométrie avec le tracé d’un dessin d’ornement, et en dernier lieu, l’aspirant est tenu d’exécuter de ses mains et sous les yeux de ses examinateurs une pièce en fer ou en bois. Beaucoup de candidats, fiers de leur force en mathématiques, se tirent assez mal de cette épreuve de travail manuel qu’ils méprisent un peu ; mais une fois qu’ils sont reçus à l’école, les choses changent de face pour eux, comme nous le verrons bientôt.

Dans les derniers jours du mois de septembre, l’Officiel publie chaque année la liste des cent nouveaux élèves admis à l’école d’Aix. À côté du nom de chacun des heureux concurrens figure l’indication de son département d’origine, qui naturellement n’est pas toujours, à beaucoup près, celui où le jeune garçon a terminé ses études en vue de l’admission. La série périodique de ces tableaux présente un certain intérêt et mérite d’être consultée, car elle met en évidence certaines inégalités de recrutement assez curieuses.

D’abord, il faut s’attendre à voir les régions à grande industrie fournir un nombreux contingent. Saône-et-Loire tient la tête (13 réceptions en 1891, dont 4 dans les 10 premiers de la liste), et de même que le Rhône et la Loire, envoie des élèves intelligens et travailleurs, mieux élevés et plus calmes que leurs camarades du midi. L’apport du Dauphiné et de la Savoie est déjà moindre. Viennent ensuite les départemens provençaux ou, pour mieux dire, Marseille et Toulon, qui fournissent quelques futurs industriels,