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Heureusement, ici encore, des traités et des arrangemens existent, que n’a pu emporter le zèle iconoclaste des démolisseurs d’accords commerciaux. Les cinq pays sont parties contractantes avec la France, pour la propriété des marques et dessins de fabrique, dans la convention d’union signée à Paris le 20 mars 1883, qui reste en vigueur. Une convention littéraire signée le 11 juillet 1866 avec le Portugal est toujours exécutoire. Des lois spéciales protègent la propriété artistique et littéraire étrangère dans les Pays-Bas, la Belgique et l’Espagne. Enfin et surtout, la convention d’union, signée à Berne le 9 septembre 1886, contient des garanties essentielles pour cette propriété littéraire et artistique. Des traités, on le voit, — Toujours des traités.

Il est curieux qu’il ne se soit pas trouvé un protectionniste pour demander la dénonciation de la convention de Berne. Elle lie pourtant la France envers d’autres pays (en même temps qu’elle lie d’autres pays envers la France), et elle rend de grands services, double motif de proscription. On sait que cette convention est née des efforts persévérans de l’association littéraire et artistique internationale, fondée en 1878, issue elle-même de l’initiative de la Société des gens de lettres. Après avoir travaillé avec le concours d’esprits éminens de tous pays à l’élaboration d’un code commun de la propriété littéraire et artistique, elle a réussi à le faire adopter par un grand nombre d’États étrangers, puissans ou petits, voisins ou lointains. C’était un grand progrès, car les traités entre nations sont comme les accords qui président aux relations sociales entre individus : supprimez les uns et les autres, vous avez dans le dernier cas l’état sauvage, dans le premier l’état de guerre.

Après les négociations du cabinet en janvier 189" et l’inauguration du nouveau régime le 1er février, la situation s’est donc présentée ainsi :

Le tarif minimum est appliqué depuis cette date à la Suède et à la Norvège, aux Pays-Bas, à la Belgique, à la Suisse et aussi à la Grèce par voie de négociations directes. Il l’est également, par voie de conséquence, à l’Angleterre, à l’Allemagne, à l’Autriche-Hongrie, à la Russie, à la Turquie, au Danemark, au Mexique, etc., qui, en vertu de traités non dénoncés ou de lois spéciales, bénéficiaient encore, au 1er février, du tarif conventionnel. Tous ces pays appliquent aux marchandises françaises le traitement de la nation la plus favorisée. Mais tout cela, qu’on ne l’oublie pas, est précaire, constamment révocable. Pour la Suisse, par exemple, il était entendu que l’on trouverait à bref délai autre chose, et il s’agit d’établir avec elle ce nouveau modus vivendi.

Les relations commerciales restent tendues avec l’Italie, l’Espagne