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quotidien de l’administrateur ; il lui donne, il lui demande des avis ; il lui fait part de ses renseignemens ; il combine avec lui les mesures à prendre ; là, où il n’y a pas d’administrateur, c’est lui qui le supplée ; et bien plus, dans les provinces frontières, dans les districts nouvellement conquis, parmi les populations moins civilisées ou plus turbulentes, c’est lui qui, durant des années entières, prend en main toute l’administration et prépare peu à peu le terrain aux autorités civiles. Enfin, il se peut même qu’intéressé par ce côté de sa tâche, il entre, pour une période plus ou moins longue, dans les cadres politiques, sans d’ailleurs, pour cela, rompre ses attaches avec l’autorité militaire[1].

Le jour où nous aurions une armée coloniale commandée par de pareils officiers, on pourrait sans crainte la faire dépendre du ministère des Colonies : ce n’est pas celle-là ‘qui créerait des « affaires ».

Jusque-là, il est indispensable qu’on attende.


IV. — L’ADMINISTRATION CENTRALE DES COLONIES.

L’organisation intérieure du ministère varie nécessairement avec la liberté qu’on a laissée aux colonies. Avec des colonies déjà anciennes, aux frontières arrêtées, à l’administration assise, si l’on a su, en outre, leur assurer de bonnes lois et de bons fonctionnaires, le ministère n’a plus qu’un devoir de contrôle bien facile. Nos colonies, en général, n’en sont pas là : elles sont sorties de lisières : elles ne marchent pas encore toutes seules et le ministère ne peut se dispenser de veiller sur elles. Ce n’est pas toutefois une raison pour multiplier outre mesure les surveillans et constituer un ministère abondant en directeurs et en chefs de division.

Le sous-secrétariat des Colonies, ce n’est un secret pour personne, n’était pas un modèle de bonne organisation. D’abord simple bureau du ministère de la marine, puis transformé en direction, élevé enfin à la dignité de sous-secrétariat, il avait grandi à l’aventure. D’année en année, on projetait de le remanier. Il est devenu un ministère avant que les remaniemens aient pu être effectués.

  1. Cette esquisse sommaire est empruntée à l’expérience de l’armée anglaise des Indes. Les résultats obtenus par les Anglais après beaucoup de tâtonnemens et d’erreurs, permettent de recommander leur méthode. Voir sur ce sujet : The Army book for the empire, by Lt General W. H. Goodenough et Lt Colonel J. C. Dalton ; un vol. in-8o, 1893, H. M. Stationery office, 1893 ; India army regulation, vol. I, partie 1, clauses 215 et suivantes ; l’article sur l’Indian army, dans l’Encyclopedia Britannica, 9e édit., vol. II, p. 589 à 593 ; et un article sur l’Indian staff corps, paru dans le United service magazine, octobre 1892.