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Plaisantes disputes; mais répétées chaque jour, à propos de tout, elles eussent lassé un négociateur moins tenace que notre Gascon.

Je ne puis rappeler ici que la plus importante de ses poursuites, la grande affaire de l’absolution du roi, « la plus grande que le Saint-Siège eût eue depuis plusieurs centaines d’ans, » disait Clément VIII à la Congrégation des cardinaux. Paruta en écrivait à la Sérénissime République : « Jusqu’au dernier jour, on avait pu tout redouter de l’irrésolution du pape et de la pression des Espagnols, et il avait fallu plus qu’un génie humain pour faire aboutir cette merveilleuse affaire de l’absolution. » Ce génie était celui de d’Ossat, qui mena seul toute l’instance pendant des années, bataillant pied à pied contre les résistances ou les exigences excessives du pape Clément. A l’approche du jour où le pontife devait prendre l’avis du consistoire, le déchaînement des Espagnols passa tout ce qu’on avait vu jusqu’alors. C’était leur dernière partie, puisqu’on allait enlever le dernier prétexte aux troubles de France. Le duc de Sessa courut de porte en porte, chez les cardinaux, achetant, menaçant, ameutant tout le Sacré-Collège. D’Ossat triompha, obtint du pape qu’il prononcerait seul, après clôture des bouches. Quand Du Perron arriva pour recueillir le fruit de cette laborieuse préparation, les procès-verbaux étaient déjà rédigés dans les termes consentis par le roi. L’ambassadeur n’eut qu’à se joindre à son collègue, le 17 septembre 1595, pour s’agenouiller avec lui sous la baguette du pénitencier, devant Saint-Pierre, et pour entendre à ce prix lecture du décret d’absolution, au milieu du peuple assemblé, au bruit des salves d’artillerie du château Saint-Ange.

Les mécontens reprochèrent à Henri IV l’acceptation de cette cérémonie comme une humiliation inutile. D’Ossat avait très bien vu qu’il en fallait marquer fortement le caractère, pour que nul ne pût contester, par la suite, la validité de la réconciliation royale; et l’humiliation rejaillissait sur les Espagnols, qui avaient remué ciel et terre pour en empêcher l’heureux effet. Si Paris valait bien une messe, la paix définitive des esprits valait bien un coup de baguette sur les épaules d’un subrogé pénitent. — « Ainsi, Sire, tout ce propos d’une matière difficile et chatouilleuse, et de points si sensitifs, se passa avec autant de douceur et d’amiableté qu’aurait su faire le plus facile et équitable sujet du monde. » — C’est une des belles lettres de 1595, où d’Ossat raconte au roi la joute courtoise et serrée des derniers pourparlers. Sa vaste érudition lui fournit des réponses immédiates à tous les argumens de l’adversaire. Le Saint-Siège exige le retrait d’un arrêt du Parlement qui condamne comme scandaleuse